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Antoine Bourrillon, Grégoire Benoist, Christophe Delacourt (Collège National des Pédiatres Universitaires (CNPU)) - (L'Université Médicale Virtuelle Francophone (UMVF)) - France - html - (Source : http://campus.cerimes.fr/media/campus/deploiement/pediatrie/enseignement/malaise_grave/site/html/1.html)
Le malaise du nourrisson constitue un motif fréquent de consultation aux urgences pédiatriques. Les nourrissons d’âge < 6 mois sont les plus concernés, avec une prédominance masculine.
Un malaise grave du nourrisson est un accident inopiné et brutal, entraînant des modifications du tonus et/ou de la coloration des téguments et/ou du rythme respiratoire, avec ou sans perte de connaissance.
L’analyse anamnestique du malaise doit être rigoureuse et chronologique :
Le malaise est souvent bénin, mais source d’une anxiété parentale importante.
Le nourrisson est habituellement hospitalisé pendant au moins 24–48 heures au décours d’un malaise grave authentifié et récent.
Cela permet de prescrire des examens complémentaires à titre systématique voire d’autres orientés par les données cliniques, de surveiller l’évolution à court terme, et de rassurer les parents.
Le malaise se définit comme un accident inopiné et brutal associant à des degrés variables :
La description du malaise est souvent rapportée par les parents, seuls témoins de l’épisode. Il importe au médecin de traduire leur sémiologie verbale (« il est devenu tout bleu... mou... »), et d’identifier comme telle la survenue d’un malaise authentique du nourrisson.
Les signes fonctionnels rapportés sont transitoires, et le premier examen clinique est le plus souvent normal. L’anamnèse est essentielle, tant pour évaluer la gravité du malaise que sa cause.
Le malaise est un symptôme parfois sévère dont il importe de préciser la cause.
Le malaise est fréquemment bénin, mais souvent considéré comme grave par les parents. L’impression de mort imminente conduit les parents à pratiquer parfois des manœuvres de réanimation sur leur enfant (bouche à bouche, secouage...).
Il importe donc de distinguer le vécu dramatique de l’épisode par l’entourage, du réel degré de gravité sur des critères objectifs cliniques et paracliniques.
L’item de l’ECN couple la thématique du malaise grave avec celle de mort inattendue du nourrisson (MIN), traitée au chapitre 9.
Les parents font également cet amalgame ; ce qui justifie en cas de malaise grave ou ressenti comme tel, une hospitalisation pour surveillance rapprochée et réassurance parentale.
Depuis que les conditions de couchage à risque de MIN ont été identifiées, il n’a pas été démontré de risque accru de MIN à distance d’un malaise, dès lors qu’un bilan étiologique complet a permis d’identifier la cause de ce malaise et de mettre en œuvre un traitement adapté.
Être systématique dans sa démarche diagnostique, pour rassurer les parents... et se rassurer !
L’examen clinique de l’enfant doit être rigoureux et orienté.
Tableau 8.1 Critères de gravité d’un malaise du nourrisson
Hémodynamiques | |
Teint gris | |
Bradycardie ou tachycardie, hypotension ou hypertension | |
Allongement du temps de recoloration cutanée, état de choc | |
Signes d’insuffisance cardiaque | |
Ventilatoires | |
Cyanose | |
Irrégularités du rythme respiratoire persistantes (bradypnées, apnées) | |
Signes de lutte respiratoire | |
sat(O2) < 90 % sous air | |
Neurologiques | |
Geignement, bombement de la fontanelle | |
Troubles de conscience (perte de contact prolongée ou répétée, somnolence, coma) | |
Déficit focalisé, hypotonie ou hypertonie axiale/périphérique | |
Mouvements anormaux (clonies, mâchonnements, pédalage) |
La sévérité symptomatique est appréciée au domicile par la famille, mais aussi lors de la prise en charge médicale susceptible de mettre en œuvre des mesures de réanimation.
Malaise « grave » : détresse brutale hémodynamique, ventilatoire ou neurologique.
Ces examens sont à prescrire en urgence pour :
Faire une glycémie capillaire dès l’arrivée.
Tableau 8.2 Examens complémentaires systématiques
Bilan sanguin (BS) | |
Glycémie capillaire puis veineuse | |
NFS-plaquettes | |
CRP, PCT (si disponible) | |
Ionogramme sanguin (+ créatininémie, urée) | |
Calcémie, transaminases | |
± lactates (si sévérité clinique) | |
Autres | |
ECG avec mesure du QT corrigé (fig. 8.1) | |
Radiographie de thorax (face) | |
BU |
Figure 1 : Mesure du QT corrigé
Un QTc > 440 ms doit faire suspecter un syndrome du QT long.
Tout nourrisson ayant fait un malaise authentifié et récent (≤ 24 h) doit être hospitalisé pour au moins 24–48 heures.
Ce maintien en observation, même de courte durée, a pour objectifs de :
Hospitalisation pour tout malaise authentifié et récent chez un nourrisson.
2.2.1 - Causes de malaise grave (tableau 8.3)
Il importe de « hiérarchiser » ces causes selon leur fréquence et les données cliniques.
Tableau 8.3 Causes de malaise grave chez un nourrisson
Reflux gastro-œsophagien (RGO) | |
Douleur aiguë | |
Œsophagite | |
Invagination intestinale aiguë | |
Ischémie myocardique | |
Causes obstructives mécaniques hautes | |
Rhinite obstructive | |
Vomissements, fausses routes (bébé glouton, médicament à la pipette) | |
Inhalation de corps étranger (mobile) | |
Causes neurologiques | |
Convulsions | |
Hémorragies intra- ou péricérébrales, syndrome des enfants secoués | |
Causes infectieuses | |
Apnées : bronchiolite (VRS), coqueluche (B. pertussis), grippe, adénovirus | |
Sepsis sévère | |
Causes rares | |
Cardiaques : tachycardie supraventriculaire, syndrome du QT long, cardiopathie malformative | |
Métaboliques : hypoglycémie, hypocalcémie, anomalie de la β-oxydation des acides gras | |
Intoxications : CO, médicament, vaccin | |
Syndrome de Münchhausen | |
Mécaniques : asphyxie par enfouissement facial, trachéomalacie, fistules |
En fonction du contexte, l’épisode de malaise peut être rapporté à une cause infectieuse, digestive, respiratoire, cardiaque, neurologique, ou encore métabolique. Leur intrication est néanmoins possible (ex. : RGO et rhinite obstructive).
Repérer les causes transversales avec d’autres items de l’ECN.
2.2.2 - Enquête clinique
Anamnèse
Description sémiologique du malaise : avant/pendant/après (tableau 8.4).
Tableau 8.4 Description sémiologique du malaise
Avant | |
Contexte : prise de biberon ou change (RGO), repas (corps étranger), coucher, sommeil | |
Environnement : témoins, lieu, position de l’enfant | |
Prodromes : fièvre et/ou syndrome infectieux, troubles digestifs, modification du comportement | |
Pendant | |
Signes fonctionnels d’orientation | |
Signes de gravité clinique éventuels | |
Chronologie, durée des symptômes | |
Après | |
Récupération : spontanée ou aidée, rapide ou lente | |
Suivi : stabilisation ou récidive immédiate | |
Délai écoulé entre l’épisode et la consultation |
Examen clinique
L’examen clinique doit être complet, avec notamment : la recherche de bruits respiratoires, d’hématomes, d’ecchymoses, de rétrognathisme, de palais ogival. L’enfant est observé durant son sommeil et durant un repas lacté (succion-déglutition).
Cet examen est le plus souvent normal à distance de l’épisode (au moment de la consultation) ; ce qui ne permet d’exclure aucune cause, notamment neurologique.
2.2.3 - Enquête paraclinique
Aucun examen complémentaire (en dehors des examens à l’arrivée de l’enfant aux urgences) ne doit être prescrit de manière systématique. L’enquête paraclinique à visée étiologique doit être orientée par les données anamnestiques et cliniques.
En cas d’orientation vers une cause neurologique, il faut discuter :
Un Holter cardiaque est indiqué en cas de :
Raisonner selon : « avant/pendant/après » le malaise.
2.2.4 - Synthèse de la conduite diagnostique
Cette conduite diagnostique est représentée figure 8.2.
Conduite diagnostique (d’après les recommandations du Groupe de pédiatrie générale de la Société française de pédiatrie, 2014)
Identifier la cause du malaise a un intérêt pronostique majeur.
Le pronostic du malaise est celui de l’affection sous-jacente, qu’il faut traiter pour prévenir les récidives. Dans tous les cas, les parents doivent avoir compris les mécanismes physiopathologiques de l’événement, la cause retenue et le traitement prescrit.
On vérifiera aussi les conditions de couchage de l’enfant (décubitus dorsal).
Un accompagnement des parents est essentiel.
Ils doivent être rassurés en cas de pathologie bénigne et/ou traitable (ex. : RGO).
Des mesures d’accompagnement sont indispensables en cas d’annonce d’une pathologie rare mais sévère (ex. : troubles du rythme cardiaque).
Lorsque l’affection causale n’a pas pu être identifiée, il faut discuter au cas par cas l’indication d’un monitoring cardiorespiratoire au domicile, dont les indications actuelles sont exceptionnelles :
Le pronostic de l’épisode est celui de l’affection causale.
Une question type pour un cas clinique à l’ECN, nécessitant de :
Foucaud, P., 2011. Malaises du nourrisson. In : Bourrillon, A., (Eds.), Pédiatrie pour le Praticien, sixth ed. Elsevier-Masson, Paris.
Recommandations sur la prise en charge du malaise du nourrisson - À paraître - (GPG-SFP).
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