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Revue de presse scientifique de APIDPM Santé tropicale


Directives pour le traitement hospitalier des enfants sévèrement malnutris

Organisation Mondiale de la Santé (OMS) - () - France - pdf - (Source : )

Directives pour le traitement hospitalier des enfants sévèrement malnutrisChaque année, quelque 10,6 millions d'enfants meurent avant leur cinquième anniversaire. Sept sur dix de ces décès sont dus à la diarrhée, à la pneumonie, à la rougeole, au paludisme ou à la malnutrition. Le manuel de l'OMS intitulé « La prise en charge de la malnutrition sévère : Manuel à l'usage des médecins et autres personnels de santé à des postes d'encadrement » et les directives suivantes ont été rédigés pour améliorer le traitement hospitalier de la malnutrition sévère. La stratégie OMS-UNICEF de prise en charge intégrée des maladies de l'enfant (IMCI) vise elle aussi à réduire le nombre de ces décès en améliorant les traitements.

Si des directives particulières sont nécessaires, c'est en raison des profonds changements physiologiques et métaboliques qui se produisent lorsque l'enfant devient malnutri, changements qui touchent chaque cellule, chaque organe et chaque système; ce processus de changement est appelé adaptation réductive. L'enfant malnutri ne répond pas aux traitements médicaux de la même façon que s'il était alimenté normalement. L'enfant malnutri court de bien plus grands risques de mourir, avec ou sans complications, que ses camarades bien nourris. Avec une prise en charge hospitalière et des soins de suivi appropriés, on peut sauver la vie de bien des enfants.

Les directives ci-après proposent des instructions simples et précises pour le traitement des enfants sévèrement malnutris. Elles visent à apporter une aide concrète aux responsables de la prise en charge médicale et nutritionnelle de ces enfants. Le manque de soins appropriés mène à la diarrhée, à la perte d'appétit, à un ralentissement de la récupération, et à une mortalité élevée. Ces problèmes peuvent être surmontés à condition de respecter quelques principes de base.

Au sens des présentes directives, la malnutrition sévère se définit par la présence d'une émaciation grave (<70% poids-taille ou <–3ET) et/ou d'œdème bilatéral aux pieds. (Une table de référence poids-taille figure en Annexe 1).

Les directives sont réparties en cinq chapitres :

Nous vous présentons ici les 2 premiers chapitres

A. PRINCIPES GÉNÉRAUX DES SOINS COURANTS (les "10 étapes")

On distingue dix étapes essentielles :

  1. Traitement et prévention de l'hypoglycémie ;
  2. Traitement et prévention de l'hypothermie ;
  3. Traitement et prévention de la déshydratation ;
  4. Correction du déséquilibre électrolytique ;
  5. Traitement et prévention des infections ;
  6. Correction des carences en micronutriments ;
  7. Entreprendre une réalimentation progressive ;
  8. Atteindre la croissance de rattrapage ;
  9. Apporter une stimulation sensorielle et un soutien affectif ;
  10. Préparer le suivi après rétablissement.

Ces étapes sont à franchir en deux phases : une phase de stabilisation initiale, où sont prises en charge les affections médicales aiguës; et une phase de récupération plus longue. On notera que les procédures du traitement sont similaires pour le marasme et le kwashiorkor. L'encadré ci-dessous donne un ordre de grandeur des périodes en question :

Dix étapes essentielles

2 Ashworth A., Jackson A., Khanum S., Schofield C. – Ten steps to recovery : Child dialogue, 3 et 4, 1996.

Étape 1. Traitement et prévention de l'hypoglycémie

L'hypoglycémie et l'hypothermie apparaissent en général ensemble, et sont signes d'infection. On recherchera l"hypoglycémie chaque fois que l'hypothermie (axillaire<35,0°C, rectale<35,5°C) sera constatée.
Une alimentation fréquente est importante pour prévenir ces deux affections.

Traitement :

Si l'enfant est conscient et si la bandelette indique <3 mmol/l ou 54 mg/dl, donner :

  • bolus 50 ml de solution glucose ou saccharose à 10% (1 cuill. café rase de sucre dans 3,5 cuill. soupe d'eau), par voie orale ou sonde nasogastrique (NG). Puis aliment de départ F-75 (voir étape 7) toutes les 30 min pendant 2 h (un quart de la dose pour 2 h à chaque prise) ;
  • antibiotiques (voir étape 5) ;
  • alimentation toutes les 2 h, jour et nuit (voir étape 7).

Si l'enfant est inconscient, léthargique ou convulsif, donner :

  • glucose stérile à 10% par IV (5 ml/kg), puis 50 ml de glucose ou saccharose à 10% par NG. Ensuite aliment F-75 comme ci-dessus ;
  • antibiotiques ;
  • alimentation toutes les 2 h, jour et nuit.

Surveillance :

  • glucose sanguin : si faible, répéter le test après 2 h en prélevant du sang au doigt ou au talon. Une fois traités, la plupart des enfants se stabilisent dans les 30 min. Si le taux de glucose chute à <3 mmol/l, donner nouveau bolus 50 ml de glucose ou saccharose 10% et poursuivre l'alimentation chaque 30 min jusqu'à stabilisation ;
  • température rectale : si elle chute à <35,5°C, répéter le test ;
  • état de conscience : s'il se dégrade, répéter le test.

Prévention :

  • alimentation toutes les 2 h, en commençant immédiatement (voir étape 7) ou, si nécessaire, après réhydratation ;
  • toujours poursuivre l'alimentation tout au long de la nuit.

Remarque : S'il est impossible de tester le glucose sanguin, considérer tous les enfants sévèrement malnutris comme hypoglycémiques et les traiter en conséquence.

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Étape 2. Traitement et prévention de l'hypothermie

Traitement : Si la température axillaire est <35°C, prendre la température rectale à l'aide d'un thermomètre hypothermique.

Si la température rectale est <35,5°C (<95,9°F) :

  • alimenter immédiatement (ou entamer la réhydratation le cas échéant) ;
  • réchauffer l'enfant : soit en habillant l'enfant (tête comprise), en le couvrant avec une couverture chauffée et en plaçant à proximité un radiateur ou une lampe (pas de bouillotte), soit en plaçant l'enfant sur la poitrine nue de la mère (peau contre peau) et en les couvrant tous deux ;
  • administrer des antibiotiques (voir étape 5).

Surveillance :

  • température corporelle : pendant le réchauffage, prendre la température rectale toutes les 2 h jusqu'à ce qu'elle atteigne >36,5°C (toutes les 30 min si on utilise un radiateur) ;
  • s'assurer que l'enfant demeure toujours couvert, surtout la nuit ;
  • le toucher pour voir s'il est chaud ;
  • taux de glucose sanguin : rechercher l'hypoglycémie dès que l'hypothermie est constatée.

(On trouvera en Annexe 2 un modèle de table pour enregistrer la température, le pouls et la fréquence respiratoire).

Prévention :

  • alimentation toutes les 2 h, en commençant immédiatement (voir étape 7) ;
  • toujours alimenter tout au long de la journée et de la nuit ;
  • tenir l'enfant couvert et à l'abri des courants d'air ;
  • le maintenir au sec, changer les couches, vêtements et literies humides ;
  • éviter de le surexposer (bains, examens médicaux prolongés) ;
  • le laisser dormir la nuit contre sa mère (sa nourrice) pour profiter de sa chaleur.

Remarque : Si l'on ne dispose pas d'un thermomètre hypothermique et si la température de l'enfant est trop basse pour s'afficher sur un thermomètre ordinaire, on considérera l'enfant comme hypothermique.

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Étape 3. Traitement et prévention de la déshydratation

Remarque : L'œdème n'est pas incompatible avec un faible volume sanguin. Ne pas utiliser la voie intraveineuse pour la réhydratation, sauf dans les cas de choc, et même alors l'employer avec précaution, en perfusant lentement pour éviter d'engorger la circulation et de surcharger le cœur (voir Section B : Le traitement en urgence).

Traitement :

Les solutions de réhydratation orale ordinaires (90 mmol sodium/l) contiennent trop de sodium et trop peu de potassium pour l'enfant sévèrement malnutri. A la place, on administrera une Solution spéciale de Réhydratation pour la Malnutrition (ReSoMal) (recette en Annexe 3).

Il est difficile d'évaluer l'état de déshydratation de l'enfant sévèrement malnutri sur la seule base des signes cliniques. On considérera donc tous les enfants atteints de diarrhée aqueuse comme déshydratés et on leur administrera :

  • ReSoMal 5 ml/kg toutes les 30 min pendant 2 h, par voie orale ou sonde nasogastrique, puis ;
  • 5-10 ml/kg/h pendant les 4 à 10 h suivantes : la quantité exacte sera déterminée par la volonté de l'enfant, ses selles et ses vomissements. Aux heures 4, 6, 8 et 10, si la réhydratation se poursuit, remplacer les doses de ReSoMal par de la préparation F-75, puis ;
  • poursuivre l'alimentation en F-75 (voir étape 7).

Pendant le traitement, les fréquences respiratoire et cardiaque rapides devraient ralentir, et l'enfant commencer à uriner.

Surveiller les progrès de la réhydratation :

Observer et enregistrer, toutes les 30 min pendant 2 h puis toutes les heures pendant 6-12 h :

  • fréquence cardiaque ;
  • fréquence respiratoire ;
  • fréquence des mictions ;
  • fréquence des selles/vomissements.

Le retour des larmes, une bouche humide, des yeux et une fontanelle moins enfoncés, une meilleure élasticité de la peau, sont également des signes de progrès de la réhydratation. On notera cependant que nombre d'enfants sévèrement malnutris ne montreront aucun de ces changements, même une fois entièrement réhydratés.

La persistance d'un pouls et d'une respiration rapides pendant la réhydratation indique soit une infection coexistante, soit une surhydratation. Les signes d'un excès de liquides (surhydratation) sont un accroissement des fréquences cardiaque et respiratoire, une aggravation de l'œdème, et des paupières bouffies. Si ces signes apparaissent, arrêter immédiatement les liquides et réexaminer après une heure.

Prévention :

Pour prévenir la déshydratation chez l'enfant souffrant de diarrhée aqueuse persistante :

  • poursuivre l'alimentation en F-75 (voir étape 7) ;
  • remplacer le volume approximatif des selles par de la solution ReSoMal : à titre indicatif, donner 50-100 ml après chaque selle aqueuse. (Remarque : il est habituel chez l'enfant malnutri d'évacuer souvent de petites selles informes : elles ne doivent pas être confondues avec des selles aqueuses abondantes, et ne nécessitent pas de remplacement en liquide) ;
  • si l'enfant est allaité au sein, en encourager la poursuite.

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Étape 4. Correction du déséquilibre électrolytique

Tous les enfants sévèrement malnutris présentent un excès de sodium corporel, même si le sodium plasmatique paraît insuffisant (donner de fortes doses de sodium est mortel). Des carences en potassium et en magnésium sont également présentes, et peuvent prendre au moins deux semaines à corriger. L'œdème résulte en partie de ce déséquilibre. NE PAS traiter l'œdème à l'aide de diurétiques.

Administrer :

  • supplément potassium 3-4 mmol/kg/jour ;
  • supplément magnésium 0,4-0,6 mmol/kg/jour ;
  • pendant la réhydratation, donner un liquide de réhydratation à faible teneur en sodium (ReSoMal par exemple) ;
  • préparer les aliments sans sel.

Le supplément de potassium et de magnésium peut se préparer sous forme liquide et s'ajouter directement aux aliments pendant leur préparation. L'Annexe 3 donne une recette de solution combinée électrolytes-minéraux. En ajoutant 20 ml de cette solution à 1 litre d'aliments, on apporte le supplément de potassium et de magnésium requis. On peut aussi ajouter cette solution à la solution ReSoMal.

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Étape 5. Traitement et prévention des infections

Dans les cas de malnutrition sévère, les signes habituels de l'infection comme la fièvre sont souvent absents, et les infections non apparentes.

On donnera donc systématiquement lors de l'admission :

  • un ou des antibiotiques à large spectre ET ;
  • vaccination contre la rougeole si l'enfant a plus de 6 mois et n'est pas vacciné (reporter à plus tard en cas de choc).

Remarque : Certains spécialistes donnent systématiquement, en plus des antibiotiques à large spectre, du métronidazole (7,5 mg/kg toutes les 8 h pendant 7 jours) pour hâter la réparation de la muqueuse intestinale et réduire les risques de dommages oxydatifs et d'infection systémique par prolifération excessive de bactéries anaérobies dans l'intestin grêle.

Choix des antibiotiques à large spectre : (voir l'Annexe 4 pour le dosage des antibiotiques) :

a) si l'enfant semble n'avoir pas de complications donner :

  • Cotrimoxazole 5 ml en suspension pédiatrique par voie orale deux fois par jour pendant cinq jours (2,5 ml si poids <6 kg).(5 ml équivalent à 40 mg TMP + 200 mg SMX) OU

b) si l'enfant est très malade (apathique, léthargique) ou présente des complications (hypoglycémie; hypothermie; peau crevassée; infection des voies respiratoires ou urinaires), donner :

  • Ampicilline 50 mg/kg IM/IV toutes les 6 h pendant 2 jours, puis amoxycilline orale 15 mg/kg toutes les 8 h pendant 5 jours, ou en l'absence d'amoxycilline poursuivre l'ampicilline mais par voie orale, 50 mg/kg toutes les 6 h. ET ;
  • Gentamicine 7,5 mg/kg IM ou IV une fois par jour pendant 7 jours.

Si l'enfant ne présente pas d'amélioration clinique dans les 48 h, AJOUTER :

  • Chloramphénicol 25 mg/kg IM ou IV toutes les 8 h pendant 5 jours.

Si des infections spécifiques sont identifiées, AJOUTER :

  • antibiotiques spécifiques si recommandés ;
  • traitement antipaludéen si l'enfant présente une goutte épaisse positive aux parasites du paludisme.

Si l'anorexie persiste après cinq jours de traitement aux antibiotiques, achever un cycle complet de 10 jours. Si l'anorexie persiste encore, réexaminer entièrement l'enfant en recherchant des sites d'infection et des organismes potentiellement résistants, et s'assurer que les suppléments vitaminiques et minéraux ont été correctement administrés.

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Étape 6. Correction des carences en micronutriments

Tous les enfants sévèrement malnutris présentent des carences vitaminiques et minérales. Bien que l'anémie soit courante, on ne donnera PAS initialement de fer, mais on attendra que l'enfant ait bon appétit et recommence à gagner du poids (normalement vers la deuxième semaine), car le fer risquerait d'aggraver les infections.

Donner :

  • Vitamine A orale le Jour 1 (pour >12 mois, donner 200 000 UI; pour 6-12 mois, donner 100 000 UI; pour 0-5 mois, donner 50 000 UI) à moins d'être certain qu'une dose ait été reçue dans le mois précédent.

Donner chaque jour pendant au moins 2 semaines :

  • Supplément multivitamines ;
  • Acide folique 1 mg/jour (donner 5 mg le Jour 1) ;
  • Zinc 2 mg/kg/jour ;
  • Cuivre 0,3 mg/kg/jour ;
  • Fer 3 mg/kg/jour mais seulement lorsque l'enfant prend du poids.

L'Annexe 3 donne une recette de solution combinée électrolytes-minéraux. En ajoutant 20 ml de cette solution à 1 litre d'aliments, on apporte le supplément de potassium et de magnésium requis. On peut aussi ajouter cette solution à la solution ReSoMal.

Remarque : Un mélange combinant électrolytes, minéraux et vitamines pour la malnutrition sévère est disponible dans le commerce. Il pourra remplacer la solution électrolytes-minéraux ainsi que les suppléments multivitamines et en acide folique mentionnés aux étapes 4 et 6, mais il faudra tout de même administrer les fortes doses uniques de vitamine A et d'acide folique le Jour 1, ainsi que le fer quotidiennement après le début de la prise de poids.

Étape 7. Entreprendre une réalimentation progressive

Dans la phase de stabilisation, une approche prudente est requise en raison de l'état physiologique fragile de l'enfant et de sa capacité homéostasique réduite. L'alimentation devra être entreprise aussitôt que possible après l'admission, et être calculée de façon à apporter juste assez d'énergie et de protéines pour entretenir les processus physiologiques de base. Les éléments essentiels de la phase de stabilisation sont les suivants :

Les formules de départ et programmes d'alimentation proposés ci-dessous sont conçus pour atteindre ces objectifs.

Des formules lactées comme la préparation de départ F-75, contenant 75 kcal/100 ml et 0,9 g de protéines/100 ml satisferont la plupart des enfants (voir les recettes à l'Annexe 5). Administrer à l'aide d'un bol. Les enfants très affaiblis pourront être nourris à l'aide d'une cuillère, d'un compte-gouttes ou d'une seringue.

Voici un programme recommandé, où les volumes sont progressivement accrus et les fréquences progressivement réduites :

Jours Fréquence Vol/kg/repas Vol/kg/jour
1 – 2 toutes les 2 h 11 ml 130 ml
3 – 5 toutes les 3 h 16 ml 130 ml
6 – 7+ toutes les 4 h 22 ml 130 ml

Pour des enfants ayant bon appétit et pas d'œdème, ce programme pourra s'accomplir en 2-3 jours (par exemple 24 h à chaque niveau).

L'Annexe 6 indique les volumes par repas déjà calculés selon le poids corporel. L'Annexe 7 indique les volumes des repas pour les enfants atteints d'œdème sévère. On prendra comme base le poids au Jour 1 pour calculer combien donner, même si l'enfant perd ou gagne du poids pendant cette phase.

Si, compte tenu de tout vomissement, l'apport n'atteint pas 80 kcal/kg/jour (105 ml de préparation de départ/kg) malgré la fréquence des repas, les caresses et les encouragements, administrer l'aliment restant par sonde NG (voir aux Annexes 6 et 7, colonne 6, les volumes apportés au-dessous desquels une alimentation NG est requise). Ne pas dépasser 100 kcal/kg/jour pendant cette phase.

Surveiller et noter :

  • quantités proposées et restes ;
  • vomissements ;
  • fréquence des selles aqueuses ;
  • poids corporel journalier.

Pendant la phase de stabilisation, la diarrhée devrait progressivement diminuer et les enfants œdémateux perdre du poids. Si la diarrhée persiste sans amélioration, en dépit d'une réalimentation prudente, ou si elle s'aggrave sensiblement, voir la section C4 (diarrhée persistante).

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Étape 8. Atteindre la croissance de rattrapage

Dans la phase de récupération, une approche volontariste de l'alimentation est nécessaire pour assurer des apports très élevés et un gain pondéral rapide de >10 g/kg/jour. La préparation lactée recommandée F-100 contient 100 kcal et 2,9 g de protéines/100 ml (voir les recettes à l'Annexe 5). On peut aussi utiliser des bouillies ou aliments familiaux modifiés, à condition que leurs concentrations protéino-énergétiques soient analogues.

La capacité à entrer en phase de récupération est signalée par un retour de l'appétit, habituellement une semaine environ après l'admission. Une transition progressive est recommandée pour éviter le risque d'une insuffisance cardiaque pouvant survenir si l'enfant consomme soudainement de très grosses quantités.

Pour passer de la préparation de départ à celle de rattrapage :

  • remplacer la préparation de départ F-75 par la même quantité de préparation de rattrapage F-100 pendant 48 h, puis ;
  • augmenter chaque repas successif de 10 ml jusqu'à ce qu'il reste un peu d'aliment. Ce stade interviendra sans doute lorsque l'apport atteindra environ 30 ml/kg/repas (200 ml/kg/jour).

Surveiller pendant la transition les signes d'insuffisance cardiaque :

  • fréquence respiratoire ;
  • fréquence cardiaque.

Si la respiration s'accélère de 5 mouvements/min ou plus et le pouls de 25 pulsations/min ou plus pendant deux intervalles de lecture de 4 h consécutifs, réduire le volume par repas (donner F-100 toutes les 4 h à 16 mg/kg/repas pendant 24 h, puis 19 ml/kg/repas pendant 24h, puis 22 mg/kg/repas pendant 48 h, puis augmenter chaque repas de 10 ml comme ci-dessus).

Après la transition, donner :

  • repas fréquents (au moins toutes les 4 h) d'une préparation de rattrapage en quantités illimitées ;
  • 150-220 kcal/kg/jour ;
  • 4-6 g de protéines/kg/jour ;
  • si l'enfant est allaité au sein, encourager à poursuivre (Remarque : le lait maternel ne contient pas assez d'énergie et de protéines pour permettre une croissance de rattrapage rapide).

L'Annexe 8 donne l'intervalle des volumes d'alimentation libre en F-100.

Surveiller les progrès après transition en calculant le taux de gain pondéral :

  • peser l'enfant chaque matin avant le repas. Noter le poids (l'Annexe 9 en fournit un exemple) ;
  • chaque semaine, calculer et noter le gain pondéral en g/kg/j3.

Si le gain pondéral est :

  • faible (<5 g/kg/j), l'enfant a besoin d'un nouvel examen complet (voir Section D) ;
  • modéré (5-10 g/kg/j), vérifier si les apports visés sont atteints, ou si une infection a échappé à l'attention ;
  • satisfaisant (>10 g/kg/j), continuer à encourager les mères et le personnel.

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Étape 9. Apporter une stimulation sensorielle et un soutien affectif

La malnutrition sévère entraîne un retard de développement mental et comportemental.

On assurera :

  • des soins affectueux et attentifs ;
  • un milieu gai et stimulant ;
  • une thérapie par le jeu structuré pendant 15 à 30 min/jour (on en trouvera des exemples en Annexe 10) ;
  • une activité physique dès que l'enfant se porte assez bien ;
  • si possible, une participation des mères (par exemple réconfort, alimentation, toilette, jeux).

3 Calcul du gain pondéral :
Cet exemple est pour un gain sur 7 jours, mais la même procédure peut s'appliquer à tout intervalle :

Étape 10. Préparer le suivi après rétablissement

Un enfant ayant atteint un poids-taille de 90 % (équivalent de –1 ET) peut être considéré comme rétabli. Son rapport poids-âge sera sans doute encore faible, en raison du retard de croissance, et les bonnes pratiques alimentaires ainsi que la stimulation sensorielle devront être poursuivies à domicile. On montrera au parent ou à la personne responsable de l'enfant comment :

Conseiller au parent ou à la personne responsable de :

On trouvera en Annexe 11 un modèle de carte de sortie.

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B. LE TRAITEMENT EN URGENCE DU CHOC ET DE L'ANEMIE SEVERE

Sommaire

Le traitement des affections associées

  1. Le choc chez l'enfant sévèrement malnutri ;
  2. L'anémie sévère chez l'enfant malnutri.

1. Le choc chez l'enfant sévèrement malnutri

Le choc de déshydratation et le choc septique coexistent très souvent chez l'enfant sévèrement malnutri. Il est difficile de les différencier d'après les seuls signes cliniques. Les enfants déshydratés répondront aux liquides de perfusion, alors que ceux souffrant de choc septique n'y répondront pas.

La quantité de liquide à administrer est déterminée par la réponse de l'enfant, sachant que la surhydratation est à éviter.

Pour commencer le traitement :

  • donner de l'oxygène ;
  • donner du glucose stérile à 10 % (5 ml/kg) par IV ;
  • donner un liquide de perfusion à 15 ml/kg pendant 1 h.
    Employer du lactate de Ringer avec dextrose 5 %; ou soluté semi-physiologique avec dextrose 5 %; ou solution de Darrow réduite de moitié avec dextrose à 5 %; ou en cas d'indisponibilité, lactate de Ringer ;
  • mesurer et noter les fréquences cardiaque et respiratoire toutes les 10 min ;
  • donner des antibiotiques (Voir étape 5 Lien vers le chapitre 1 (extérieur à cette page)).

En cas de signes d'amélioration (baisse des fréquences cardio-respiratoires) :

  • renouveler la perfusion 15 ml/kg pendant 1 h; puis
  • passer à la réhydratation orale ou NG par ReSoMal*, 10 ml/kg/h pendant jusqu'à 10 h (laisser le cathéter en place en cas de besoin ultérieur); alterner l'administration de ReSoMal* et de F-75, puis
  • poursuivre l'alimentation par la préparation de départ F-75.

* Voir les Recettes : ReSoMal & solution électrolytes-minéraux

En l'absence d'amélioration après la première heure de traitement (15 ml/kg), on supposera que l'enfant est en état de choc septique.

En ce cas :

  • donner perfusion d'entretien (4 ml/kg/h) en attendant du sang ;
  • dès que du sang est disponible, transfuser du sang frais total à 10 ml/kg lentement pendant 3 h; puis
  • commencer l'alimentation avec F-75 (Voir étape 7 Lien vers le chapitre 1 (extérieur à cette page)).

Si l'état de l'enfant s'aggrave pendant le traitement (accélération de la respiration de 5 mvts/min ou plus et du pouls de 25 pulsations/min ou plus) :

  • arrêter la perfusion pour éviter que l'état n'empire encore.

2. L'anémie sévère chez l'enfant malnutri

La transfusion sanguine s'impose si :

  • Hb < 4 g/dl ;
  • ou détresse respiratoire et Hb comprise entre 4 et 6 g/dl.

Administrer :

  • sang total 10 ml/kg de poids corporel, lentement, pendant 3 h ;
  • furosémide, 1 mg/kg par IV au début de la transfusion.

Il est absolument essentiel de ne pas dépasser ce volume de 10 mg/kg pour l'enfant sévèrement malnutri. Si celui-ci présente des signes d'insuffisance cardiaque, transfuser du concentré globulaire (5-7 ml/kg) au lieu de sang total.

Surveiller les signes de réaction transfusionnelle. Si l'un quelconque des signes suivants apparaît pendant la transfusion, arrêter celle-ci :

  • fièvre ;
  • urticaire prurigineuse ;
  • urines rouge foncé ;
  • confusion ;
  • choc.

Surveiller aussi les fréquences respiratoire et cardiaque, toutes les 15 min. Si l'une ou l'autre s'élève, ralentir la transfusion. Après la transfusion, si l'hémoglobine demeure <4 g/dl ou se situe entre 4 et 6 g/dl avec détresse respiratoire persistante, NE PAS renouveler la transfusion avant 4 jours. En cas d'anémie légère ou modérée, on donnera du fer oral pendant deux mois pour reconstituer les stocks de fer, MAIS ne jamais entamer ce traitement avant que l'enfant n'ait commencé à gagner du poids.

Annexe

Recette de la solution de réhydratation orale ReSoMal

Ingrédients Quantités
Eau (bouillie et refroidie) 2 litres
SRO-OMS 1 sachet pour 1 litre*
Sucre 50 g
Solution électrolytes/minéraux (recette ci-dessous) 40 ml

* 3,5 g chlorure de sodium, 2,9 g citrate trisodique déshydraté, 1,5 g chlorure de potassium, 20 g glucose.

Recette de la solution électrolytes-minéraux (utilisée dans la préparation de ReSoMal et des aliments lactés)

Peser les ingrédients suivants et compléter pour faire 2500 ml.
Ajouter 20 ml de solution électrolytes-minéraux à 1000 ml d'aliment lacté.

Ingrédients Quantités Molarité de 20 ml
Chlorure de potassium : (KCl) 224 24 mmol
Citrate de tripotassium : (C6H5K3O7.H2O) 81 2 mmol
Chlorure de magnésium : (MgCl2.6H2O 76 3 mmol
Acétate de zinc : (Zn(CH3COO)2.2H2O) 8,2 300 µmol
Sulfate de cuivre : (CuSO45H2O) 1,4 45 µmol
Eau pour faire 2500 ml  

Remarque :

si disponibles, ajouter du sélénium (sélénate de sodium 0,028 g par 2500 ml, NaSeO4.10H2O) et de l'iode (iodure de potassium 0,012 g par 2500 ml, KI).

Préparation :

Dissoudre les ingrédients dans l'eau bouillie et refroidie. Conserver la solution au réfrigérateur en flacons stérilisés, pour en retarder la détérioration. Jeter la solution si elle devient trouble. Préparer de la solution neuve chaque mois.

S'il n'est pas possible de confectionner cette solution électrolytes-minéraux, et si l'on ne dispose pas de sachets prêts à l'usage (voir Étape 4), donner séparément K, Mg et Zn.

Potassium :

Magnésium :

Donner une dose unique intramusculaire de sulfate de magnésium à 50 % (0,3 ml/kg jusqu'à un maximum de 2 ml)

Zinc :

Préparer une solution à 1,5 % d'acétate de zinc (15 g d'acétate de zinc dans 1 litre d'eau). Donner la solution d'acétate de zinc à 1,5 % par voie orale, 1 ml/kg/jour.

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