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Moment ne saurait être propice que celui de la journée internationale de la femme pour Mme Fatou Thiam Diallo, présidente d’Inner Wheel Dakar Téranga, pour participer à sa manière à cette campagne lancée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) pour faire face à cette terrible maladie qui touche majoritairement les communautés pauvres d’Afrique Subsaharienne. Le cadre choisi fut la salle de conférence de l’immeuble EPI sis en face du bureau des statistiques de Dakar (Point E). Le programme proposé fut un panel auquel participèrent d’éminents spécialistes en la matière comme les Professeurs Serigne Magueye Guèye (Chef du Service Urologie de l’Hôpital de Grand-Yoff) et Djibril Diallo (Obstétricien Gynécologue du CHU), d’autre par la Sage Femme, chargée d’IEC à la Direction de la Santé de la Reproduction, Mme Mariama Mbaye et le modérateur du panel le Dr Manuel Pina Gynécologue Obstétricien.
Pour en revenir à ce lourd handicap nommée incontinence urinaire causée par les fistules obstétricales, il est important de définir la maladie que représente la fistule. Elle est présentée par l’OMS comme une maladie souvent méconnue et considérée comme honteuse. Elle est causée par une pression prolongée de la tête du bébé sur le bassin de la mère lors d’une complication de l’accouchement, ce qui crée une lésion des tissus.
La chirurgie peut traiter avec succès 80 à 90 % des cas
C’est donc en donnant la vie que les victimes des fistules se retrouvent avec un lourd handicap parce qu’incapable de contrôler l’écoulement de son urine et de ses selles à cause d’une fistule vésico-rectale. Du coup, elles sont victimes de rejet, d’abandon, d’exclusion de leurs familles et dans des cas extrêmes de leurs communautés. La détresse est quasiment permanente chez les fistuleuses. C’est ainsi que certaines d’entre elles refusent de quitter l’hôpital où elles se sentent plus intégrées que dans leurs propres familles. Du fait de l’odeur des urines, elles ne veulent pas non plus se déplacer à bord des véhicules de transport en commun pour se rendre à l’hôpital.
Selon les statistiques de l’Organisation Mondiale de la Santé, près de 2 000 000 (deux millions) de femmes dans les pays en voie de développement souffrent de fistules et cinquante mille (50 000) à cent mille (100 000) nouveaux cas sont découverts chaque année dans le monde. En Afrique de l’Ouest, les taux de mortalité maternelle sont les plus élevés au monde. Et au Sénégal, les régions de Tambacounda et de Kolda sont les régions qui présentent le taux de mortalité le plus élevé, avec 1200 décès pour 100 000 naissances vivantes, comparée à la moyenne nationale qui est de 510 décès. Des solutions simples existent, mais elles demeurent inaccessibles. D’une part lorsqu’une femme est affligée de cette maladie, la chirurgie peut traiter avec succès 80 à 90 % des cas et permet ainsi aux femmes de retrouver une vie normale au sein de leur communauté. D’un autre côté, une opération pour une fistule dure généralement une vingtaine de minutes et coûte entre cent cinquante mille francs (150 000 FCFA) au Sénégal.
Prévention et IEC : Mettre fin aux croyances néfastes à la femme
La création de centre de référence avec une possibilité d’assurer une formation pratique aux agents techniques médicaux est une stratégie qui va permettre à terme de faire opérer le maximum de malades et faire face du coup aux longs déplacements vers les grands centres urbains.
Pour le Pr Djibril Diallo, la réussite dans ce combat contre cette
maladie de la honte passe nécessairement par la formation des agents
de la santé. Intervenant dans les aspects de la prévention face
à la fistule, le Pr Djibril Diallo a préconisé pour prévenir
cette infirmité deux axes prioritaires de prévention. Il s’agit
entre autres de la lutte contre la sexualité et les maternités
précoces et d’autre part, de la lutte contre la malnutrition et
certaines habitudes nutritionnelles néfastes. Les problèmes de
la croissance des bassins selon lui se posent au jeune âge et sont consécutifs
à la malnutrition.
L’autre aspect évoqué par le Pr Djibril Diallo est la lutte
contre les mutilations génitales féminines et les croyances coutumières
qui les confortent.
Sur le plan médical, le premier palier selon le Pr Diallo est l’action
de sensibilisation auprès des femmes enceintes de procéder aux
consultations prénatales afin de dépister toutes les formes de
pathologies susceptibles de compliquer l’accouchement. Le second palier
selon consiste à améliorer les retards dans les consultations
prénatales ; de réduire les obstacles qui freinent la prise de
décision en cas d’évacuations urgentes ; d’augmenter
pour les décideurs l’accessibilité géographique aux
structures sanitaires ; de réduire les retards dans la prise en charge
des malades ; et de veiller à la formation du personnel médical.
Dans le cadre de la communication face à cette maladie, Mme Mariama Mbaye,
sage femme à la direction de la santé de la reproduction trace
deux voies. D’abord, une sensibilisation au sein des communautés
et une seconde voie qui cible les fistuleuses et leur entourage.
Le message selon elle doit être centré sur la définition de la fistule, la cause de ce mal, les modalités du traitement, la durée du traitement et son coût. Elle n’a pas manqué de plaider en faveur du soutien affectif que les populations doivent réserver pour les femmes qui portent cet handicap, un soutien qui doit aussi être financier, mieux encore pour les décideurs, rendre gratuit le traitement.
Le Pr Serigne Maguèye Guèye, Urologue : « Il faut créer un hôpital pour les fistuleuses »
En donnant les grandes lignes du diagnostic de cette maladie et la prise en charge chirurgicale, le Professeur Serigne Magueye Guèye en terminant son propos a recommandé pour les décideurs, la création dans la région orientale du Sénégal d’un centre régional de prise en charge des fistules uro-génitales, autrement dit, un hôpital pour les fistuleuses.
Sur le plan épidémiologique, le Pr Magueye Guèye a noté que 73 % des fistuleuses ont moins de 20 ans ; 35 % d’entre elles sont atteintes de ce mal avant l’âge de 15 ans ; 61 % des fistules sont survenues lors des premières grossesses ; (…) ; et que 95 % de ces fistules sont d’origines obstétricales. Elles sont selon lui, les causes de plusieurs cas de mortalité maternelle. Si le traitement est délicat, il est selon lui accessible dans plusieurs cas.
Causée par une mauvaise communication entre la vessie et le vagin, la fistule met la personne atteinte de ce mal dans une situation où elle ne peut pas garder ses urines. Pour le Pr Magueye Guèye, les affections les plus fréquentes sont enregistrées dans les pays en voie de développement, ce qui dénote d’une mauvaise couverture sanitaire. Il en ressort selon lui un impact psychosocial dramatique « être sèche ou mourir ». Les facteurs qui favorisent la fistule sont les mutilations féminines, les mariages précoces, l’absence de suivi des grossesses, (…), et l’encadrement. Pour le Pr Guèye, il y a 15 % de fistules qui sont incurables. « Sans un traitement au préalable, il est illusoire d’espérer un résultat positif », averti-t-il. D’autant explique-t-il « que le traitement a pour but de restaurer l’étanchéité, la continence, la sexualité et la reproduction de la malade.
Donnant les grands principes du traitement chirurgical, le Pr Magueye Guèye a évoqué le choix du moment approprié pour faire l’opération. Il a préconisé aux patientes d’attendre deux à trois mois après l’accouchement. Autres principes l’évaluation préopératoire complète et une bonne exposition. Pour ce dernier, la meilleure chance de réussite est d’utiliser la technique que l’on a pour habitude de faire.
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