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Le ministre de la Santé, à la tête d'une délégation
composée de ses plus proches collaborateurs et des partenaires techniques
et financiers, a visité les régions sanitaires des Hauts-Bassins,
des Cascades et du Sud-Ouest, du 26 au 29 mai 2004. Le premier responsable
de la santé fait ainsi sienne l'assertion "une chose est de gouverner
de loin et une autre est d'administrer de près". Près de 2 000 kilomètres
de route c'est la distance que le ministre de la Santé, Alain Yoda,
les directeurs généraux et centraux et les partenaires techniques
et financiers ont parcourue dans les régions sanitaires des Hauts-Bassins,
des Cascades et du Sud-Ouest. Si l'objectif principal de cette tournée
était pour le ministre de "voir comment travaillent les agents sur
le terrain", celui-ci a eu l'occasion de vivre les conditions dans
lesquelles le travail est fait.
Les Hauts-Bassins
La tournée du ministre a débuté par la région des
Hauts-Bassins dans l'après-midi du mercredi 26 mai. Le premier point
de chute de la délégation a été le Centre de transfusion sanguine
de Bobo-Dioulasso ; un complexe au stade de la finition. A peine
la visite entamée qu'une grande pluie s'annonça (et tomba), ce qui
fera dire au ministre qu'il est venu avec "sa" pluie. Bref ! Le
marathon commence le lendemain avec notamment l'"auscultation" du
Centre hospitalier universitaire Souro Sanou de Bobo-Dioulasso.
Ce centre qui est l'un des trois établissements sanitaires de référence
(avec Yalgado et la Pédiatrie Charles-de-Gaulle) ne dispose pas
de bien de spécialistes. Sans être exhaustif, le Dr Kambou Timothée,
chirurgien-chef, explique que dans leur domaine, ils ne sont que
trois. Parmi eux, un est en instance de départ pour le privé. Le
troisième a deux "casquettes" puisqu'il relève des forces armées
nationales, donc un collaborateur. Celui-ci a d'ailleurs été félicité
par la délégation pour la constance de son appui aux deux autres.
Si l'on ajoute le fait que dans la "doublette", un est enseignant
à l'Université, "avec obligation de recherche", la situation au
CHUSS préoccupe quelque part.
Surtout que ceux-ci sont écartelés entre les visites aux malades
hospitalisés, les interventions, l'enseignement et la garde, etc.
En outre, l'hôpital de Bobo manque de traumatologue (pour les soins
des accidentés, des fracturés...). Il en est de même de cardiologue,
le seul en poste étant allé dans le privé.
La région sanitaire des Hauts-Bassins (13e région) est forte d'environ
1,5 million d'habitants et est, après la Boucle du Mouhoun, la deuxième
en matière d'aire géographique. Elle comprend 5 districts et 2 centres
médicaux avec antenne chirurgicale (CMA). La présence du ministre
a permis l'inauguration du CMA de Dané à une soixantaine de km de
Bobo, fruit de la coopération entre la Banque islamique de développement
(BID) et le gouvernement du Burkina Faso. Un autre CMA poussera
de terre au secteur 15 de Bobo dont la pierre a été posée le 27
mai 2004 par le ministre de la Santé. Ce qui désengagera Souro Sanou.
Problèmes moins criards à Banfora,
mais...
A Banfora, le ministre et sa suite ont visité le
Centre hospitalier régional (CHR) et le Centre de santé et de promotion
sociale (CSPS) de Siniérra. La région sanitaire des Cascades comprend
deux districts : Banfora et Sindou pour une population de 300 000
habitants.
Le CHR de Banfora est constitué de locaux "anciens et vétustes"
et est "assis" sur deux sites. Le nouveau site recevant les services
du bloc opératoire est à une bonne distance, rendant un peu plus
difficile la prise en charge des césariennes estimées à 13%. Qu'à
cela ne tienne, le Dr Doli Prosper Bébé du bloc opératoire arbore
une certaine fierté pour Banfora. "Nous sommes un peu mieux que
certains. Nous avons deux chirurgiens et des attachés de santé.
Même le Nord de la Côte d'Ivoire et Bobo viennent nous voir. Il
y a aussi un gynécologue même s'il partira bientôt". Un son de cloche
plus nuancé est celui de la directrice régionale, Mme Bangagné Yemdam
qui, se fondant sur une"vue régionale" dit que les Cascades manquent
d'eau potable malgré l'abondance de pluies. Pour elle, le Sida fait
des siennes dans la zone qui est à "haute transmission du VIH parce
que frontalière". Et comme dans les Hauts-Bassins, le paludisme
vient en tête, suivi des infections respiratoires aiguës des maladies
persistantes. Elle n'oublie pas la dracunculose et la méningite
même si cette dernière n'a pas été épidémique cette année.
Faible taux de fréquentation
des formations sanitaires à Banfora et à Gaoua
Dans les deux régions, des facteurs socioculturels
et sociologiques entravent la fréquentation des populations des
centres de soins. A Banfora par exemple, les populations se ruent
d'abord sur les "officines" des tradipraticiens qui, selon les agents
de santé, foisonnent dans la région. La voie des formations sanitaires
ne s'ouvre à elles que quand il y a des complications. Et le ministre
de la Santé a eu l'opportunité de dire aux habitants de Siniéna
que la "tradithérapie est bien mais combiner les deux systèmes est
encore mieux, sinon privilégier les soins de la médecine moderne".
2 lits sur 5 occupés au CHR
de Gaoua par les malades du Sida
La région sanitaire du Sud-Ouest compte quatre
districts que sont Batié, Gaoua, Dano et Diébougou avec un total
de 66 formations sanitaires dont 5 privées. Le rayon moyen d'action
à Gaoua est de 13 km. Si la distance est telle que rejoindre les
centres de santé est difficile pour les populations, les facteurs
socioculturels et la pauvreté les en éloignent.
Au CHR, travaillent "jusqu'à" six généralistes ; mais aucun spécialiste
(gynécologie, pédiatrie, chirurgie, cardiologie...). En médecine,
30% des lits sont occupés sur 210 lits, dont 2 lits sur 5 par les
PVVIH. La région, de l'avis des agents de santé, eu égard à sa situation
frontalière (Côte d'Ivoire, Ghana) connaît une séroprévalence au-dessus
du taux national. Ce qui a fait dire au représentant de l'ONUSIDA,
Dr Sakbo que le fait que Gaoua est frontalier avec (le Nord) la
Côte d'Ivoire y est pour quelque chose car des villes comme Khorogo
enregistrent un fort taux de malades du Sida dans leurs formations
sanitaires.
Pour cette tournée le ministre Yoda a amené l'ambassadeur des Pays-Bas,
les représentants de l'UNICEF, l'OMS, l'UNFPA, l'ONUSIDA, la Banque
mondiale, la Suède, Médecins sans frontière... Ceux-ci, lors des
visites des infrastructures ont eu toute la latitude de "prêcher
chacun pour sa chapelle" et de toucher du doigt l'état de la coopération
intersectorielle et la décentralisation. Mais l'enseignement principal
de cette tournée est le manque de personnel spécialisé dans les
structures sanitaires, un manque qui va au-delà de ces trois régions.
C'est ce qui est ressorti des visites des infrastructures, des entretiens
avec les autorités politiques, administratives, religieuses, partenaires
et personnel de santé et représentants des comités de gestion COGES
(structures communautaires).
Souleymane SAWADOGO
Lire l'article original : http://www.sidwaya.bf/sitesidwaya/sidwaya_quotidiens/sid2004_31_05/societe_2.htm
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