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GUINEE MADAGASCAR MALI R.D. CONGO SENEGAL TOGO
Fraternité matin | Côte d'Ivoire | 21/02/2006 | Lire l'article original
Outre l'amélioration du taux de dépistage, le PNLT s'assigne
pour mission de renforcer la capacité et la qualité des soins
aux patients de la tuberculose en vue d'atteindre un taux de guérison
de 85% à l'horizon 2009.
Mais, les écueils sont nombreux, dont l'indifférence, voire le
confinement auquel sont souvent réduits les malades. Le PNLT entend dès
lors travailler à " promouvoir la prise de conscience des populations
et l'implication des communautés dans les activités de lutte contre
la tuberculose ". La stratégie DOTS, qui a déjà fait
ses preuves dans des communes comme Adjamé et Yopougon grâce à
l'implication d'ONG (Organisations non gouvernementales), va ainsi être
couplée avec le renforcement des capacités nationales de planification,
de coordination et de suivi des activités du système de lutte
contre la tuberculose tant au niveau central qu'au niveau décentralisé.
Mobilisation !
S'il est un facteur qui, incontestablement, pourra assurer le succès
des activités de lutte contre la tuberculose, c'est indubitablement la
mobilisation de la communauté. S'il est vrai que la tuberculose est un
problème de santé publique, il est désormais établi
que " c'est l'ensemble du système de santé qui permet de
soigner cette maladie " (dixit Dr San Koffi Moïse -voir interview).
La tuberculose existe partout, nous fait savoir, par ailleurs, le directeur
coordonnateur du PNLT. "C'est l'importance de l'endémie qui diffère
d'un pays à l'autre… On sait que quand les conditions de vie des
populations ont été améliorées, la tuberculose a
fortement reculé", souligne-t-il. Et d'ajouter : "Le développement
peut réduire les cas de tuberculose ". Une vérité
de La Palisse sans nul doute…
Pays sous-développés que nous sommes ou pays en développement
(à chacun sa préférence), il nous faut, sans nul doute,
recourir à ce qui a fait la force de nos sociétés jadis
: la solidarité. Laquelle se manifeste par une mobilisation et une entraide
sans faille face aux problèmes majeurs.
Il faut rendre propre son habitacle pour éviter la tuberculose ; il faut
rendre propre chez soi et chez les autres aussi. Mais, il faut aussi de la solidarité,
dans le contexte de paupérisation actuel pour sauver les nôtres
qui sont affectés par la maladie afin de couper la chaîne de contamination.
Mobilisation, mobilisation…
Par Elvis kodjo
Dr. San Koffi Moïse, directeur coordonnateur du pnlt : “les grandes villes sont les plus affectees”
M. le directeur coordonnateur du Programme national de lutte contre
la tuberculose (PNLT), pouvez-vous faire le point de la lutte contre la tuberculose
en Côte d'Ivoire ? Le pays est-il très infecté par cette
maladie ?
La Côte d'Ivoire fait partie des pays de forte endémie tuberculeuse.
Il y a beaucoup de cas de tuberculose, l'image des pays en Afrique au Sud du
Sahara. Une raison explique cette situation. Il y a pratiquement deux décennie
maintenant, la survenue de l'infection à VIH. Nous savons que dans les
pays où l'infection à VIH est élevée, les cas de
tuberculose sont en progression. Il y a un lien étroit entre les deux
affections. On constate aussi que les cas de tuberculose se rencontrent dans
les régions ou il y a un fort taux de déplacement, de la population
avec une promiscuité, il y a aussi les cas de conflit qui entraînent
une perturbation du système d'offre de soins. De telle sorte que les
malades qui sont contagieux dans la communauté, ne sont pas pris en charge.
Dès lors qu'ils n'ont pas été mis sous traitement, ils
continuent d'être contagieux. Et quand la période de contagiosité
est longue, il y a plus de risque de voir d'autres personnes contaminées.
C'est la raison pour laquelle on dit que lorsqu'un malade tuberculeux n'a pas
été diagnostiqué et mis sous traitement, il contamine entre
10 et 20 personnes. Les données en notre disposition montrent qu'en 2005
nous avons eu 20.025 cas. Or, nous n'avons pas encore les données de
toutes les structures de santé. Il est donc clair que nous aurons au-delà
des 20.000 cette année. C'est dire que la tuberculose est un problème
de santé publique.
Avec la présence du SIDA, comment arrivez-vous à organiser
le suivi des malades ?
La vision du ministère de la Santé est de faire en sorte que partout
où le diagnostic de la tuberculose peut être réalisé,
il le soit. Nous voulons rendre accessible le diagnostic de la tuberculose.
Et de la même manière rendre accessible le diagnostique du VIH
SIDA partout en Côte d'Ivoire. Et comme nous savons qu'environ 45% des
malades de la tuberculose sont aussi porteurs de l'infection du VIH. Il s'agit
de personnes atteintes de tuberculose. Il faut laisser la possibilité
au malade de décider. S'il accepte que le test du VIH soit réalisé,
le test lui est proposé. De la même manière, les malades
déjà reconnus comme porteurs du VIH, bénéficie au
cours de leur suivi, des examens liés au diagnostic de la tuberculose.
Parce qu'il s'agit d'une population fragile qui peut développer facilement
la tuberculose.
Quelles sont les régions les plus touchées par la tuberculose
?
La répartition est homogène sur l'ensemble du territoire. Partout
en Côte d'Ivoire, on rencontre des cas de tuberculose. Cependant, on rencontre
beaucoup plus de cas dans les zones de fortes densités de population.
Dans les grandes villes comme Abidjan, Bouaké, San Pedro, nous avons
beaucoup plus de cas de tuberculose.
Quelles sont les causes de la tuberculose ? Pourquoi la maladie persiste
en Côte d'Ivoire alors que, selon certaines sources, elle n'existe pratiquement
plus en Europe ?
Je voudrais dire que la tuberculose existe partout. C'est plutôt l'importance
de l'endémie qui est différente. Dans un pays comme le Canada
ou l'Italie, nous avons moins de 10 cas de tuberculose pour 100.000 habitants.
Cependant, quand on arrive dans les pays au Sud du Sahara ou dans les pays pauvres,
les taux sont plus élevés, on peut même atteindre 300 cas
pour 100.000 habitants. En suivant le développement des pays européens,
on sait que quand les conditions de vie des populations ont été
améliorées, la tuberculose a fortement reculé. Quand il
s'est agi de réduire la promiscuité dans la population, les cas
de tuberculose ont baissé. C'est dire que le développement peut
aussi réduire les cas de tuberculose. Les antibiotiques ont aussi permis
de réduire les cas qui existaient en Europe. Par contre en Afrique, il
s'agit de pays en devenir, toutes les infrastructures ne sont pas encore en
place. Toutes les populations n'ont pas systématiquement accès
à un centre de santé. De sorte que l'on a tendance à avoir
recours à un autre type de traitement, par exemple la médecine
traditionnelle.
La médecine traditionnelle est-elle efficace dans ce cas là
?
Pour l'instant, il n'y a pas beaucoup d'exemples de traitement traditionnel
pour guérir la tuberculose. On sait aussi que la tuberculose est contagieuse.
Le malade tousse et au cours de l'effort de toux, il peut contaminer une autre
personne. Celle-ci doit en priorité être dépistée.
La période avant le dépistage est longue. Quelqu'un qui est dépisté
six mois après le début de ses signes aura eu le temps de contaminer
beaucoup plus de personnes. Et cette situation se voit là où le
malade n'a pas accès directement aux structures de santé. Présentement,
beaucoup de structures de santé sont fermées en Côte d'Ivoire.
Il est donc important d'avoir des centres de santé qui sont assez proches
des lieux de résidence, des populations. Il serait bon que chaque personne
ait dans un rayon de cinq kilomètres un centre de santé.
Avec la guerre, peut-on dire qu'il y a de réelles menaces de
voir la tuberculose gagner du terrain, notamment dans les zones ex-assiégées
où plusieurs structures de santé ne sont plus fonctionnelles ?
Depuis le début de la crise nous avons constaté une interruption
des activités de lutte contre la tuberculose dans un certain nombre de
structures. Mais dans ces structures-là, il existait des malades qui
étaient sous traitement et qui ont dû l'interrompre. Certains se
sont déplacés en dehors de cette zone et nous avons pu les rattraper
pour continuer le traitement. Nous avons pu mettre en marche un certain nombre
de structures ; ce qui a permis de " récupérer " les
malades qui avaient interrompu leur traitement.
Par contre, il y a d'autres malades que nous n'avons pas pu retrouver. Ceux-là
s'ils ont interrompu leur traitement et qu'ils ne sont pas décédés,
il est possible qu'ils continuent de présenter une tuberculose pour laquelle
ils ont pris des médicaments avec des risques de résistance. C'est
la raison pour laquelle nous avons mené des activités dans les
grandes villes des zones ex-assiégées. Notamment Bouaké,
Korhogo, Odiénné, Touba, Man, pour essayer de rouvrir les centres
de santé pour que tous ceux qui ont pu échapper au traitement
puissent être assistés. Mais, nous savons que c'est l'ensemble
du système de santé qui permet de soigner la tuberculose. Or,
beaucoup de centres de santé de prise de contact ne sont pas fonctionnels,
ou ne sont pas aussi fonctionnels comme on l'aurait souhaité. Il est
donc important que nous puissions tous conjuguer nos efforts très rapidement
pour sortir de cette crise afin de pouvoir retrouver la situation normale qui
inclut une supervision régulière des activités des centres
qui existent ; c'est-à-dire tous ceux qui fonctionnent actuellement dans
la zone ex-assiégée, doivent être supervisés pas
seulement par le programme de lutte contre la tuberculose, mais par l'ensemble
des médecins chefs de district. Je pense que par rapport à la
situation, il n'est peut-être pas possible d'être plus efficace.
On pourrait rendre le travail meilleur optimiser les résultats.
De quelle manière ?
En introduisant un système de supervision, notamment en se rendant dans
chaque centre de santé au moins une ou deux fois dans le mois. Pour s'assurer
que la qualité de la prise en charge est la même partout en Côte
d'Ivoire.
Quelles sont les activités que vous menez concrètement
?
La direction du programme a pour mission essentielle de planifier, de promouvoir,
de suivre les activités de lutte contre la tuberculose, de les évaluer
sur l'ensemble du territoire. Il y a au total, huit Districts en Côte
d'Ivoire. Ce sont des centres de référence qui ont pour mission
de prôner les activités de lutte contre la tuberculose en Côte
d'Ivoire, d'encadrer toutes les structures de lutte contre cette maladie qui
existent dans la région, et de prendre aussi en charge les malades, surtout
les cas compliqués qui n'ont pas pu être pris en charge.
Au niveau périphérique, nous avons veillé à ce que
dans chaque département, il y ait un centre qui puisse assurer le diagnostic
de la tuberculose. Ces centres sont en contact avec les centres de santé
des différents villages, de telle sorte que un malade qui a été
dépisté au niveau du département est orienté dans
le centre de santé le plus proche de son lieu de résidence pour
être suivi. Le traitement a une durée de six mois. C'est à
la fin des six mois que le centre de diagnostic va décider de la guérison
ou non du malade. La base de toute notre action est la décentralisation.
Avez-vous enregistré des cas de guérison ?
Pour l'année 2004, nous avons enregistré 73% de taux de succès.
Ce sont des malades qui suivent leur traitement jusqu'à la fin. C'est
la raison pour laquelle nous avons adopté la "stratégie Dot",
qui consiste à permettre à quelqu'un de l'entourage du malade,
de l'observer pendant la période du traitement, afin de s'assurer qu'il
se soigne correctement.
Les médicaments sont-ils accessibles à tous ?
Les médicaments sont distribués gratuitement partout en Côte
d'Ivoire. C'est l'une des raisons pour lesquelles les médicaments ne
sont pas en officine privée. Ils sont mis à la disposition des
malades par l'Etat de Côte d'Ivoire. Toutes les structures de lutte contre
la tuberculose s'approvisionnent au centre antituberculeux à Adjamé,
ou la Pharmacie de la santé publique (PSP).
Quel est l'apport des Ong avec lesquelles vous travaillez pour la prise
en charge des malades dans la lutte contre la tuberculose ?
Un certain nombre d'associations communautaires interviennent dans la prise
en charge de la tuberculose. Généralement, ces ONG se spécialisent
dans la sensibilisation et le suivi communautaire des malades. Au niveau du
suivi, elles travaillent de concert avec les centres de santé qui les
mettent en contact avec les malades atteints de tuberculose. Elles ont un entretien
avec les malades pour que les ONG interviennent dans leur traitement. Ceci permet
d'identifier un volontaire qui va se rendre régulièrement au domicile
du malade pour s'assurer de la prise effective des médicaments. Il contribue
aussi à sensibiliser l'entourage du malade au moment où il arrive
à son lieu de résidence. Il s'agit aussi de voir dans l'entourage
du malade s'il y a d'autres personnes qui présentent une toux afin de
les faire venir au centre de santé. Nous avons pu dépister des
tuberculeux du simple fait de la présence de ces volontaires au lieu
de résidence de ces malades. Ces ONG interviennent également dans
le conseil pour le VIH Sida. Ils arrivent à convaincre certains malades
de faire leur test s'ils n'avaient pas accepté de le faire lorsqu'ils
étaient au centre de santé. Ces ONG apportent beaucoup en ce sens
que partout où elles interviennent nous sommes autour de 85% de taux
de guérison.
Interview réalisée par Marie-Adèle Djidjé
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