En dépit de son enclavement, le département d'Oussouye
est l'une des circonscriptions du Sénégal qui rassure le plus l'observateur,
en matière de santé publique. En effet, situé à une quarantaine
de kilomètres de la capitale régionale, Ziguinchor, le district
sanitaire d'Oussouye, grâce à un dispositif bien installé, est en
train d'enregistrer d'importants résultats en ce qui concerne la
couverture sanitaire. Car à côté des efforts fournis par l'Etat,
la coopération avec l'extérieur à permis, aujourd'hui, la réhabilitation
de plusieurs infrastructures sanitaires dans cette partie Sud de
la Casamance où le retour des populations se fait de plus en plus
sentir.
Si l'on en croit le médecin-chef de district, le
Dr Moustapha Cissé, Oussouye, du point de vu de la couverture sanitaire,
peut être considéré comme une zone où les clignotants sont au vert.
En effet, au niveau de la Communauté Rurale de Djimbéring, grâce
à l'effort des populations, quatre postes de Santé sont actuellement
fonctionnels. Celui du Cap-Skirring, en finition en ce moment, devrait
être réceptionné d'ici à fin de ce mois de février, si l'Etat arrive
à trouver une solution au problème d'équipement à résoudre. Un agent
est déjà affecté sur place par le district. En dehors de cette nouvelle
infrastructure, l'accalmie notée dans la zone depuis plusieurs mois
a permis la réouverture d'anciens postes de Santé dans des localités
telles que Carounatt, Diakène-Diola et Diakène-Wolof. Même si au
niveau de ce dernier village, la structure nécessite une réhabilitation.
Cette amélioration de la carte sanitaire du district
a été aussi accompagnée par un renforcement du personnel, grâce
au recrutement des contractuels au niveau de la Santé. Ces agents,
qui sont à l'image des volontaires de l'Education, opèrent aujourd'hui
dans les zones les plus reculées du département. Par ailleurs, grâce
à l'appui de la coopération espagnole, par le biais de la Fédération
d'Appui au Développement d'Oussouye (FADDO), un nouveau bâtiment
a été construit dans l'enceinte de l'hôpital de la commune d'Oussouye.
Cette infrastructure devrait être réceptionnée dans le courant du
mois de février, a souligné le médecin-chef. En effet, d'un montant
de 80 millions de nos francs, le bâtiment sera entièrement équipé
par les Espagnols. Il comprend, entre autres, des salles d'hospitalisation,
de pédiatrie, un laboratoire et une cuisine. Le Dr Cissé a révélé
en outre un projet de construction d'une nouvelle maternité et d'un
logement pour les sages-femmes. Le site devant abriter la structure
en question a été déjà identifié. En effet, face à la vétusté de
la maternité de l'hôpital d'Oussouye, cette infrastructure tant
attendue par les populations et les responsables médicaux du district
contribuera, à n'en pas douter, à améliorer de manière sensible
les conditions de travail des agents et offrir de meilleurs services.
Selon le médecin-chef, il sera logé, dans la future maternité, une
salle polyvalente pour assurer la formation continue de certains
agents comme les matrones.
Santé maternelle et infantile
En ce qui concerne la logistique, il faut souligner
qu'Oussouye ne connaît pas de problèmes majeurs. Selon le Dr Cissé,
tous les postes de Santé du district disposent de motos et d'appareils
frigorifiques. Des équipements qui ont permis de faciliter la mobilité
des agents et la conservation des produits en milieu rural. Au niveau
du département d'Oussouye, on compte aujourd'hui 90 relais polyvalents
qui se sont constitués en associations reconnues par l'État. Ils
effectuent plusieurs activités en matière de santé communautaire,
notamment des causeries sur la Santé de la Reproduction, des visites
médicales à domicile, la vente des moustiquaires imprégnées et la
sensibilisation en matière de prévention du paludisme et du VIH-Sida.
Dans le cadre du paquet d'activités intégrées en nutrition, selon
le médecin-chef de district, ces relais vont élargir leurs activités,
en faisant les pesées des enfants à domicile au niveau de leur zone
d'intervention. Cependant, la mobilité des agents et le dispositif
mis sur pied pour couvrir le maximum de cibles sur le terrain ne
s'est pas traduit par une réelle hausse du taux de couverture vaccinale
au niveau de certaines localités du district. En effet, les statistiques
montrent que ce taux reste encore en deçà des 80 % au plan national.
Au niveau du district d'Oussouve, on est à 56 % d'enfants complètement
vaccinés. C'est la raison pour laquelle, les responsables médicaux
du département ont décidé de rendre gratuite la vaccination en ce
qui concerne les enfants, afin d'améliorer les résultats obtenus
jusqu'ici. S'il y a un district qui a réalisé d'énormes progrès
en matière de Santé de la Reproduction au Sénégal, c'est bien celui
d'Oussouye. En effet, voilà une localité où l'on n'a plus enregistré
de décès en couche depuis octobre 99, si l'on en croit la sage-femme
de la maternité de l'hôpital d'Oussouye. La principale raison avancée,
sur cet important acquis en santé maternelle, est due au respect
strict des consultations prénatales par les femmes du "Kassa". À
en croire Mme Niassy, la seule sage-femme qui officie au niveau
du district, les femmes d'Oussouye, une fois en état de grossesse,
ne se font pas peine pour se rendre auprès des structures sanitaires
pour les besoins des consultations. Elles peuvent, à cet effet,
faire des kilomètres de marche uniquement pour se rendre jusqu'à
Oussouye, afin de satisfaire cet impératif. Il arrive souvent que
la sage-femme, elle-même se rende dans certaines zones enclavées
comme les îles du Kassa, pour procéder aux consultations, sur place,
des femmes en état de grossesse. Elle est aussi appuyée dans son
action par les matrones formées à cet effet. En effet, selon le
responsable du district, chaque maternité rurale dispose d'une matrone.
Ces dernières, qui bénéficient régulièrement de séries de recyclage,
étaient en grande partie des accoucheuses traditionnelles. Cependant,
avec le retour des populations déplacées de l'autre de la frontière
avec la Guinée- Bissau ou la Gambie, il y a lieu de s'attendre à
une nouvelle donne. Pour prendre les devants à cela, le médecin-chef
de district, le Dr Moustapha Cissé, a sollicité l'affectation d'une
seconde sage-femme et d'un autre médecin au niveau de sa structure.
Car en cas d'indisponibilité de l'actuelle sage-femme, les infirmiers
sont obligés de verser dans la débrouille pour combler le vide.
Santé maternelle et croyances
traditionnelles
Oussouye est une localité à forte croyance traditionnelle.
En effet, aucune femme n'ose accoucher à domicile. L'accouchement
à domicile, une pratique qui existe jusque-là dans certaines localités
de notre pays, est formellement interdit dans le département d'Oussouye.
Le sang est interdit à domicile, du fait de la cohabitation avec
les fétiches et de la rigueur des croyances traditionnelles. "On
n'accouche pas à domicile, du fait des fétiches qui se trouvent
dans les maisons", nous a précisé la sage-femme du district. Une
chose qui pousse obligatoirement les parturientes à se rendre auprès
des structures sanitaires. En ce qui concerne la Santé de la Reproduction
chez les jeunes filles, de réels efforts restent à effectuer en
matière de sensibilisation. Il suffit de souligner que du fait de
la peur du tabou social, seules les femmes qui ont déjà enfanté
ont la possibilité de prendre part aux différentes causeries et
à certaines opérations de sensibilisation liées à la reproduction
et à la planification familiale, pour mesurer les conséquences en
matière de santé reproductive chez les jeunes adolescentes et adolescents.
En effet, si l'on en croit aux responsables du district sanitaires,
ce phénomène n'est pas sans effet sur le taux de grossesses précoces
encore très élevé au niveau du département d'Oussouye. Il est très
fréquent de tomber sur des jeunes élèves en état de grossesse. Par
exemple l'année dernière, la sage-femme a reçu une adolescente de
14 ans qui est tombé malheureusement en grossesse.
Le paludisme en nette régression
Le taux de paludisme, jadis très élevé dans le
district d'Oussouye, a connu une nette régression cette année. Selon
le médecin-chef, grâce à l'appui de la coopération, le district
avait déjà anticipé sur la nouvelle méthode de traitement du paludisme
au Sénégal, grâce aux études menées sur place par l'équipe médicale,
avec la collaboration d'un coopérant français basé à Rouen. C'est
à partir des résultats obtenus par le district que le Sénégal a
opté pour un changement dans la méthode de traiter le paludisme
à l'heure actuelle. Aujourd'hui, au niveau de certaines localités
du district d'Oussouye, les patients sont soumis au traitement à
base "d'Artesunate amodiaquine" en lieu et place de la "Chloroquine",
qui a fini de montrer ses faiblesses en Afrique. Une pratique qui
n'a pas tardé à donner des résultats appréciables, selon le Dr Cissé.
UN REPORTAGE DE SEYDOU PROSPER SADIO
Lire l'article original : http://www.lesoleil.sn/archives/article.CFM?articles__id=34908&index__edition=10112
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