Les pays européens, en partenariat avec les pays
en développement, surtout ceux de l'Afrique, engagent la bataille
de la recherche clinique contre des fléaux comme le paludisme, le
sida et la tuberculose.
Le programme Edctp (partenariat des pays européens
et en développement sur les essais cliniques) a été lancé hier en
présence du ministre de la Recherche scientifique, Christian Sina
Diatta, du ministre de la Santé, Issa Mbaye Samb, et du commissaire
européen chargé de la Recherche, M. Phillipe Busquin. L'Edctp se
veut un programme de recherche pour le développement de nouveaux
produits médicaux, microbicides et vaccins destinés à lutter contre
le Vih/sida, le paludisme et la tuberculose. Pour le professeur
Souleymane Mboup, coordonnateur du Comité d'organisation du programme
Edctp, la définition de la recherche en santé qui est de générer
de nouvelles connaissances en utilisant la méthode scientifique
pour cerner et attaquer les problèmes de santé, est délibérément
globale. Et la mise en place de nouvelles plateformes d'essais cliniques,
entre l'Europe et les pays en développement, obéit à la mise en
place d'un système pluraliste de recherche sur la santé à l'échelle
mondiale, qui alimenterait des groupes scientifiques nationaux productifs.
La mission de l'Ecdtp est d'accélérer le développement
de nouvelles interventions cliniques permettant de combattre le
Vih/sida, le paludisme et la tuberculose, en particulier en Afrique
Subsaharienne, et d'améliorer la qualité de la recherche liée à
ces trois maladies. Le choix pour ces trois maladies s'explique,
selon le Pr Mboup, par le fait que ce sont des maladies responsables
d'une très grande mortalité en Afrique. "On estime à 5 à 6 millions
de personnes ceux qui meurent chaque année en Afrique du fait de
ces trois maladies que sont le paludisme, le Vih/sida et la tuberculose.
Ce sont des maladies qui appauvrissent nos pays et qui constituent
un frein au développement. D'où le concept de maladies de la pauvreté".
Actuellement, souligne le Pr Souleymane Mboup, les pays en développement
éprouvent beaucoup de difficultés à traiter ces maladies à cause
des multirésistances. Ce partenariat en vue de faire des essais
cliniques, thérapeutiques et vaccinaux est d'abord au niveau européen,
mais aussi entre Européens et Africains. Le Pr Mboup de faire remarquer
que les Africains attendent beaucoup de ce programme pour le renforcement
de leurs capacités, mais aussi pour participer à ces différentes
recherches. Ce partenariat, poursuit-il, se fait avec l'industrie
pharmaceutique de production de médicament ou de production de vaccins.
Le budget total prévu pour l'Edctp est de 600 millions d'euros pour
la période 2003-2007. Outre les 200 millions fournis par la communauté,
200 millions proviendront des activités nationales de recherche
des Etats membres et 200 millions supplémentaires doivent être fournis
par l'industrie, les organisations caritatives et le secteur privé.
A la question de savoir si ce partenariat sur la
recherche se fait au détriment de l'offre de soins, le Pr Mboup
a tenu à préciser qu'ils sont complémentaires, car l'offre de soins
ne peut pas aller sans la recherche qui est au centre de toutes
les découvertes. Et c'est en faisant de la recherche qu'on peut
arriver à améliorer ces offres de soins. Seulement, dans les pays
en voie de développement, la faiblesse se situe au niveau de la
recherche, plus particulièrement des essais cliniques. Le ministre
de la Recherche scientifique et de la Technologie représentant le
Premier ministre Idrissa Seck, n'a pas manqué de mettre l'accent
sur l'asymétrie entre les laboratoires du Nord et ceux du Sud. La
solution, selon Christian Sina Diatta, est de procéder à la décolonisation
des activités de recherche vers les pays en développement afin de
créer un nouvel espoir pour la communauté humanitaire. Indiquant
que la recherche est indispensable au développement, le ministre
dira que "l'asymétrie au niveau des laboratoires vient de ce que
l'équilibre entre le potentiel chercheur, les crédits octroyés,
l'équipement ainsi que les locaux est optimalisé dans les pays développés.
Dans les pays du Sud, regrette le ministre, l'équipement ne permet
pas souvent d'avoir les facilités requises puisque la masse des
chercheurs n'est pas souvent la masse critique requise. Il faut
un programme de formation pour avoir la masse grise de chercheurs.
Mais en le faisant, on est souvent confronté au départ des chercheurs
qui sont happés par les pays du Nord. Il nous faut inverser la procédure
qui crée des flux allant du Sud vers le Nord".
Le ministre a, en outre, insisté sur la nécessité
d'acquérir un matériel adéquat pour la recherche dans les pays en
développement et, au niveau de la communauté internationale, des
efforts doivent être faits dans ce sens. "Efforts compensés facilement
par les résultats cliniques puisque certains résultats seront nécessairement
générateurs de fonds", a souligné le ministre. Et M. Christian Sina
Diatta de lancer un appel pour un renforcement de la coopération
entre les divers pays du monde "pas seulement Afrique-Europe, mais
aussi Afrique-Asie, et entre pays en développement".
Issa NIANG
Lire l'article original : http://www.walf.sn/societe/suite.php?rub=4&id_art=8093
Philippe Busquin (Commissaire
européen chargé de la Recherche) : "La recherche donne une valeur
ajoutée à l'hôpital" - Walfadjri
- Sénégal - 23/02/2004
Wal Fadjri : En quoi consiste
le programme Edcpt ?
Philippe Busquin :
C'est un programme qui recouvre tous les pays européens, l'Ue et
des partenaires africains pour mettre au point, le plus vite possible,
des vaccins contre les trois grandes maladies de la pauvreté que
sont le sida, le paludisme et la tuberculose. C'est la première
fois que l'on réalise un programme intégré, c'est-à-dire qu'on a
ensemble toutes les recherches possibles. L'objectif est d'aboutir
au plus vite à des vaccins efficaces. Et cela a le mérite d'associer
les chercheurs africains au développement, telle manière que cela
se fasse dans les meilleures conditions possibles. Il ne suffit
pas de développer un vaccin, il faudra aussi des systèmes de santé
qui puissent l'administrer. Pendant quatre ans, l'Ue apportant 200
millions, 15 pays européens apportant 200 millions et l'industrie
aussi, car il faudra mettre sur pied les vaccins dans les phases
II et III des essais cliniques. Il y a déjà des prémices, mais l'idée
est d'optimaliser tout cela. Et donc d'aller plus vite. Parce que
ce trio de maladies frappe terriblement l'Afrique et touche des
hommes et des femmes qui souffrent et qui meurent.
Wal Fadjri : Ce programme vise-t-il
à équiper les pays africains ?
Philippe Busquin :
Il s'agit d'un programme de recherche, mais avec des laboratoires
de recherche devant avoir les équipements les plus modernes qui
soit pour pouvoir mesurer les effets physiques des vaccins. Il faut
qu'il y ait une articulation avec les systèmes de santé nationaux.
C'est important que chaque pays s'associe au processus. Dans un
pays africain, le centre de recherche joue un rôle très important,
parce qu'il permet de détecter les maladies plus vite. Et il donne
donc une valeur ajoutée à l'hôpital, dont un centre de recherche
permet d'avoir l'effectif le plus moderne en vue de mieux soigner.
Wal Fadjri : Pourquoi l'urgence
sur la recherche de vaccins et non sur les médicaments ?
Philippe Busquin :
Parce que si l'on veut éradiquer le mal, il faut trouver un vaccin.
Prendre le problème à la base. Quand vous voulez guérir avec des
médicaments, c'est bien, mais ça ne fait que remédier un problème.
Il y a eu, par exemple, une maladie comme la poliomyélite qui a
été une maladie très ravageuse. Et l'on a su trouver un vaccin qui
a pu l'éradiquer. Si on a un bon vaccin contre la malaria, on attaquera
le problème du paludisme à la racine. Et je crois que c'est cela
qui est important. Il ne suffit pas de développer des systèmes de
santé si on a pas une solution pour s'attaquer à la maladie qui
est connue depuis longtemps.
I. NIANG
Lire l'article original : http://www.walf.sn/societe/suite.php?rub=4&id_art=8095
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