Le " marketing social, qui est un puissant outil pour le changement
de comportement, est de plus en plus adopté par les gouvernements
et les bailleurs de fonds ". Il est aussi " un bon moyen d'augmenter
la contribution du secteur privé à la santé publique ". Quelque
150 spécialistes, praticiens et utilisateurs du marketing social
d'Haïti et de pays Afrique échangeront des expériences et partageront
des pratiques prometteuses, du mardi au vendredi prochain, pendant
les travaux de la quatrième conférence africaine pour le marketing
social (CAMS 03).
La quatrième conférence africaine pour le marketing social (CAMS
03) débute ses travaux, ce matin à l'hôtel Téranga de Dakar. La
cérémonie d'ouverture prévue à 9 heures sera présidée par le Pr
Awa Marie Coll Seck, ministre de la Santé, de l'Hygiène et de la
prévention. Les précédentes éditions de cette conférence ont été
organisées à Abidjan (Côte d'Ivoire). La CAMS vise à " favoriser
les échanges entre spécialistes, techniciens et utilisateurs du
marketing social dans le domaine de la santé et surtout permettre
la dissémination de pratiques prometteuses ". Elle est organisée
par Population Services International (PSI) avec la collaboration
de l'Agence pour le développement du marketing social (ADEMAS),
dans le cadre du projet régional Santé Familiale et prévention du
SIDA (SFPS/1996-fin octobre 2003). Le projet SFPS est basé à Abidjan
en Côte d'Ivoire. Quelque 100 spécialistes, praticiens et utilisateurs
du marketing social dont 50 Sénégalais participent aux travaux de
la conférence. La centaine de délégués viennent d'Haïti et de pays
africains, notamment du Bénin, du Burkina Faso, du Burundi, du Cameroun,
de la Côte d'Ivoire, du Ghana, de la Sierra Leone, de la Guinée-Conakry,
de Madagascar, du Mali, du Maroc, du Rwanda, de la république démocratique
du Congo, du Tchad et du Togo. Au cours des travaux, les participants
dégageront une stratégie de reproduction des meilleurs pratiques
ou stratégies prometteuses du marketing social afin d'améliorer
l'impact des programmes. Un de leurs objectifs sera également "
de renforcer la capacité des institutions à formuler, implanter
et évaluer des programmes de marketing social à haut impact . ".
Enfin, la conférence de Dakar devrait déboucher sur " un renforcement
de " la collaboration entre les institutions. "
CONCERTATION ET ECOUTE
Hier après-midi, M. Auguste Kpognon, directeur de programme marketing
social au Programme régional SFPS et le Dr Seynabou Mbengue Sow,
directrice exécutive de l'ADEMAS nous ont accordé un entretien.
Le premier a souligné, entre autres, que le marketing social est
" un instrument assez puissant en constante évolution " d'où " la
nécessité d'une concertation pour être à l'écoute du terrain. "
Le Dr Mbengue ajoute que le " marketing social, qui est un puissant
outil pour le changement de comportement, est de plus en plus adopté
par les gouvernements et les bailleurs de fonds. " Il est aussi
" un bon moyen d'augmenter la contribution du secteur privé à la
santé publique ". Les programmes de marketing social sont presque
partout soutenus par les bailleurs de fonds. Ce qui fait que leur
pérennisation est une préoccupation récurrente. Une des solutions
à ce problème, soutient le Dr Mbengue, est de " renforcer les capacités
des institutions " afin d'en faire des structures " viables " capables
de " formuler et de mettre en œuvre des programmes ". C'est d'ailleurs
un des objectifs de cette édition de CAMS 03. La Directrice exécutive
de l'ADEMAS pense que " le secteur privé est bien positionné pour
suppléer les bailleurs de fonds ". Toutefois, avertit M. Kpognon,
" on aura toujours besoin de subvention tant que la situation économique
ne s'améliorera. " Les produits qui bénéficient du marketing social
sont vendus à des prix accessibles au plus grand nombre. Au Sénégal,
c'est le cas, entre autres, des moustiquaires imprégnées, d'une
marque de condom et de contraceptif oral. Les consommateurs ont
tendance à penser que bas prix rime souvent avec une qualité moindre.
C'est une fausse idée, de l'avis du Dr Mbengue. Son expérience lui
prouve que " le marketing social a permis de se rendre compte que
les gens ne refusent pas d'acheter s'il y a la qualité, une bonne
communication, un bel emballage..." M. Kpognon précise qu' " il
faut être très rigoureux dans tous les aspects : produits, prix,
marketing, promotion, etc. ". La directrice exécutive de l'ADEMAS
le complète : " un bon produit, vendu au bon emplacement, au prix
adéquat et promu de la manière qu'il faut. "
TRAVAIL DE PLAIDOYER
Pour certains, le marketing social au bénéfice d'un produit peut
créer une concurrence et jouer négativement sur les ventes des autres
produits de même nature déjà disponibles sur le marché. C'est une
autre " fausse idée " balayée d'un revers de main par le Dr Mbengue.
Elle est catégorique : " le marketing social ne connaît pas la concurrence.
" Mieux, au Sénégal, insiste la directrice exécutive de l'ADEMAS,
c'est " un effet d'entraînement qui a été observé après le lancement
du condom " Protec " en 1995 et, plus tard, en 2002, du contraceptif
oral " Sécuril ". M. Kpognon, dans le sillage du Dr Mbengue, parle,
lui, de " catalyseur " tout en insistant sur le " gros travail de
plaidoyer " à faire et le dialogue à entretenir avec certaines communautés
dont celle des pharmaciens. La campagne en faveur du contraceptif
oral " Sécuril " a, en effet, " permis de combattre les rumeurs
", " d'inciter les femmes à consulter les professionnels de la santé
" et " d'élargir le choix des femmes ", rappelle le Dr Mbengue.
En 2002, grâce à " l'effet d'entraînement " parle la directrice
exécutive de l'ADEMAS, les ventes de contraceptifs oraux ont, au
Sénégal, augmenté de " 13 % dans le privé et de 26 % dans le secteur
public ". La part du marché de " Sécuril " dans le privé est de
20 % en fin 2002 (source : ADEMAS). La conférence de Dakar qui s'ouvre
ce matin devrait permettre de capitaliser toutes les expériences
et de partager les bonnes pratiques, car, on le dit M. Auguste Kpognon,
" le marketing social est pleine mutation ". Il va s'orienter, selon
lui, vers la prestation de services, de dépistage volontaire et
anonyme du VIH/SIDA, de promotion de services à grande échelle.
Cela est déjà une réalité en Afrique australe à cause notamment
de l'ampleur de l'épidémie du SIDA dans cette partie de l'Afrique.
Le Burkina Faso, le Togo et le Mali suivront. Cette nouvelle démarche
se fera à travers le renforcement des cliniques existantes pour
le diagnostic des IST/VIH/SIDA, le développement de services en
ce que concerne la transmission mère-enfant. ". Tout cela demande,
évidemment, plus de " responsabilités " pour les spécialistes, praticiens
et utilisateurs du marketing social, reconnaît Kpognon.
El Bachir SOW
Lire l'article original : http://www.lesoleil.sn/santeenv/article.cfm?articles__id=26270
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