Dans cette région où l'on note une des plus fortes prévalences
au Sénégal, les réponses au sida se multiplient. Un centre de dépistage
anonyme va être ouvert et l'on annonce l'arrivée des anti-rétroviraux.
Les personnes vivant avec le Vih/sida à Ziguinchor vont vers un
allègement de leurs peines. Les anti-rétroviraux (Arv) sont attendus
dans la région à partir du 6 mai prochain. Plus besoin ainsi, pour
ceux qui le désirent, de monter jusqu'à Dakar pour disposer de ces
médicaments. La révélation a été faite par le médecin-chef de district
de Ziguinchor, le Dr Auguste Nadièle, au cours des journées d'information
sur les infections sexuellement transmissibles et le Vih/sida organisées
le 24 avril par Fhi et l'Ong Africa Consulting International (Aci)
à l'intention des journalistes de Kolda et de Ziguinchor.
A Zighuinchor, le dispositif semble en place pour la gestion de
ces Arv. Un membre du personnel de santé revient d'une session de
formation à Dakar. Toutes les personnes vivant avec le Vih ne pourront
cependant pas bénéficier d'une prise en charge. L'accès est sélectif,
suivant des critères relatifs à l'état de santé et à des considérations
financières et sociales attestant d'une bonne capacité de suivi
du traitement. Un comité va se charger de la sélection sur dossier
médical. Cet accès aux Arv pour personnes atteintes de sida a été
salué par les acteurs intervenant dans ce domaine dans la région.
Responsable au niveau de l'Education pour la santé, Mme Coumba Cissokho
Diabang confie "qu'avant, les malades allaient jusqu'à Dakar pour
bénéficier du traitement". Les moyens économiques ne le permettent
pas toujours et le voyage par la route insupportable pour des personnes
malades.
Cette disponibilité des Arv à Ziguinchor est d'autant plus importante
que la région est créditée d'un taux de prévalence du sida d'environ
2 %, alors que la moyenne nationale tourne autour de 1 %. Chez les
professionnels du sexe, cette infection est encore plus importante.
"La prévalence annoncée dans la région est la partie visible de
l'iceberg", prévient Mme Diabang. Peu de personnes acceptent volontiers
de se soumettre au dépistage volontaire, alors qu'on peut vivre
longtemps avec le virus sans le savoir. A ce niveau encore, la région
Sud va voir combler un vide.
Selon le responsable du volet communication pour le changement
de comportement à Fhi, son institution "vient d'installer à Ziguinchor
un centre de dépistage volontaire et anonyme au sein de l'hôpital
Silence. C'est une association dénommée As Vie (Association pour
la solidarité à la vie) qui va le piloter", annonce El Hadj Diouf.
Ce centre va renforcer le dispositif de surveillance de l'infection
à Vih/sida dans la région.
Ce dispositif va avoir son importance. Ziguinchor présente en effet
des facteurs favorables à une propagation de l'épidémie. La région
est en proie à un conflit armé qui dure depuis une vingtaine d'années.
Les déplacements de populations, la pauvreté et tant d'autres facteurs
favorisent des situations à risques comme le développement de la
prostitution clandestine et régulière. Sans compter la présence
de l'industrie touristique. Certaines pratiques traditionnelles
sont aussi mises à l'index. Tout comme les protagonistes du conflit
armé, notamment les militaires, présents en grand nombre dans la
région et vivant en général loin de leurs familles, sont à tenir
en compte.
A tout cela, s'ajoute le caractère frontalier des régions de Kolda
et de Ziguinchor. La prévalence du Vih/sida serait dans l'ordre
de 8 % en Guinée-Bissau. Compte tenu de la nette différence des
niveaux d'organisation dans la lutte contre l'épidémie entre le
Sénégal et les pays limitrophes au Sud, les acteurs de la réponse
au sida estiment qu'il y a là une donnée non négligeable à prendre
en compte. A Kolda, les luuma (marchés hebdomadaires) sont considérés
comme des terrains fertiles au sida, avec les brassages de population
et les activités de prostitution qu'on y enregistre. Il y a donc
de quoi faire preuve de vigilance à Ziguinchor, par rapport au sida.
Et l'ouverture d'un centre de dépistage, en même temps qu'on met
à disposition des Arv, permet de faire face à l'épidémie sur deux
fronts : la prévention et la prise en charge des malades.
Hamidou SAGNA
Lire l'article original : http://www.walf.sn/actualites/suite.php?rub=1&id_art=1304
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