Accès aux sites pays BENIN BURKINA FASO CAMEROUN CENTRAFRIQUE CONGO COTE D'IVOIRE GABON
GUINEE MADAGASCAR MALI R.D. CONGO SENEGAL TOGO
Sidwaya | Burkina Faso | 23/01/2006 | Lire l'article original
Des scientifiques de I’IRD et du CIRMF (1) publient ce mois-ci dans la revue Nature une étude sur des petits vertébrés capturés près de carcasses de primates infectés. Ils ont, d’une part, détecté des anticorps spécifiques du virus Ebola dans le sérum de trois espèces de chauves-souris frugivores tropicales et ont, d’autre part, mis en évidence des fragments du génome viral dans le foie et la rate de ces vertébrés. Selon des observations, les grands singes se contamineraient directement par contact avec ces chauves-souris. Ces résultats constituent un élément essentiel dans la compréhension du cycle du virus dans son milieu naturel et peuvent être déterminants dans la prévention des épidémies humaines du virus Ebola. Le virus Ebola (famille des Filoviridae), identifié pour la première fois en 1976 en République Démocratique du Congo (ex-Zaïre), est à l’origine de plusieurs épidémies mortelles en Afrique centrale. Il existe quatre sous-types de ce virus dont trois sévissent sur le continent africain. Le sous-type zaïre, sous-type le plus dangereux pour l’homme, est responsable des huit épidémies ayant touché le Gabon et la République du Congo depuis 1995. L’infection par ce sous-type se manifeste chez l’homme par une fièvre hémorragique qui entraîne la mort en quelques jours dans 80% des cas. Depuis 1976, quatorze épidémies d’Ebola, dont dix dues au virus de sous-type zaïre, se sont succédées en Afrique, provoquant environ 1850 cas dont 1300 morts.
Le virus se transmet à l’homme notamment par contact direct avec
des carcasses de primates infectés (2). Si ces animaux sont à
l’origine de l’infection humaine, ils ne sont pas le réservoir
du virus. Les grands singes développent la maladie et décèdent
en quelques jours après avoir été, eux-mêmes, contaminés
au contact du réservoir. De nombreuses études, effectuées
depuis 1976 afin d’identifier ce réservoir, se sont toutes soldées
par un échec. Aujourd’hui, Eric Leroy de l’IRD au Gabon et
ses collaborateurs du CIRMF (1) publient les résultats de leurs études
effectuées entre 2001 et 2003 dans la région frontalière
du Gabon et de la République du Congo : ils ont identifié des
chauves-souris tropicales comme étant un réservoir potentiel du
virus.
Les épidémies humaines apparues depuis 2001 ont été
liées à des flambées virales concomitantes chez plusieurs
espèces animales dont les chimpanzés, les gorilles et les antilopes.
Pendant ces épisodes épidémiques, les chercheurs ont capturé
environ mille petits vertébrés sains (rongeurs, musaraignes, chauves-souris,
oiseaux et écureuils) aux alentours de carcasses de primates infectés.
Ils ont ensuite procédé à de multiples analyses: recherche
d’anticorps spécifiques du virus Ebola dans le sérum, recherche
de fragments du génome viral dans certains organes, isolement du virus
sur des lignées cellulaires sensibles, immunohistochimie sur coupes d’organes.
Ils ont ainsi détecté des anticorps spécifiques du sous-type
zaïre dans le sérum de trois espèces de chauves-souris :
hypsignasthus monstrosus, Epomops franqueti et Myonycteris torquata. Par ailleurs,
les résultats ont mis en évidence la présence de séquences
d’ARN viral dans le foie et la rate de ces mêmes animaux. Ceci montre
donc que ces chauves-souris sont porteuses du virus Ebola sans être malades,
ce qui les désigne comme un réservoir naturel potentiel du virus
Ebola.
Par ailleurs, des observations épidémiologiques ont montré
que le pic de mortalité chez les grands singes situerait lors de la saison
sèche, période pendant laquelle les ressources alimentaires s’appauvrissent
considérablement. Les chauves-souris et les primates entreraient alors
en compétition pour se nourrir, ce qui occasionnerait des rapprochements
et contacts plus fréquents. Or, la saison sèche est aussi une
phase de mise bas pour les chauves-souris. Sous l’effet de plusieurs facteurs
(carence alimentaire, compétition entre mâles et parturition) le
niveau et la nature des réponses immunitaires Chez ces dernières
changent vraisemblablement de manière significative pendant cette période.
Ce phénomène aurait pour conséquence une reprise de la
réplication virale, voire l’apparition de virus infectieux dans
le sang de ces animaux. La contamination des grands singes se ferait lorsque
les deux espèces se concentrent pour consommer les fruits d’un
même arbre, par contact direct avec le sang et les liquides placentaires
des chauves-souris échappés lors de la mise bas. Différentes
études sont en cours afin d’une part d’isoler le virus dans
ces tissus et d’autre part de confirmer les modalités de contamination
décrites ci-dessus.
Ces résultats apportent un éclairage nouveau sur la nature épisodique
des épidémies chez les primates et les hommes. De plus, une meilleure
connaissance de la répartition écologique de ces espèces
de chauves-souris pourrait permettre de développer des stratégies
préventives afin de protéger les primates du virus Ebola. Par
ailleurs, les chauves-souris, particulièrement Hypsignathus monstrosus,
sont fréquemment capturées puis consommées par les populations
des régions épidémiques. Par conséquent, des programmes
de sensibilisation et un apport de nourriture nécessaire aux besoins
des villages isolés pendant la saison sèche devraient contribuer
à empêcher une éventuelle transmission du virus Ebola de
la chauve-souris à l’homme.
Rédaction - IRD : Béatrice Le Brun
Restez informés : recevez, chaque mercredi, la revue de presse de Santé tropicale. Inscriptions
Ce contenu gratuit vous est destiné :
Adresse
Téléphone
Contactez-nous
Actualités
Articles médicaux