Accès aux sites pays BENIN BURKINA FASO CAMEROUN CENTRAFRIQUE CONGO COTE D'IVOIRE GABON
GUINEE MADAGASCAR MALI R.D. CONGO SENEGAL TOGO
L'Observateur | Burkina Faso | 20/03/2012 | Lire l'article original
La 155e Journée internationale de la Femme commémorée cette année sous le thème évocateur «mobilisation sociale pour la réduction de la mortalité maternelle : le rôle des hommes», interpelle à suffisance toutes les âmes sensibles, notamment les hommes dans leur contribution pour lutter contre ce phénomène de santé publique qui ignore les couches sociales ou les races.
Le recentrage sur la question de la mort maternelle peut être considéré comme le résultat d’un combat féministe de la décennie 1970-1980, valorisant la femme autrement que par son seul statut de mère. Depuis, l’accès pour les femmes à des «services de santé qui leur permettent de traverser en toute sécurité la grossesse et l’accouchement», est reconnu comme droit, même si celui- ci est très souvent bafoué. Mais où en est-on 25 ans après la première «Conférence mondiale sur la mortalité sans risque» tenue à Nairobi en 1987 ?
Au regard des chiffres alarmants qui, du reste, font frémir (307 décès sur 100 000 accouchements en 2006), l’on se croirait toujours aux siècles précédents, siècles des grandes pandémies (la peste, le choléra, la lèpre) et pourtant, malgré les énormes progrès réalisés dans ce domaine si sensible, on est en droit de se poser la question du pourquoi de la persistance de cet état de fait.
Bien qu’en baisse sensible, le taux de mortalité maternelle demeure encore bien au-dessus de l’acceptable dans notre pays ; comparaison faite avec les pays industrialisés ayant un taux de mortalité inférieur à 2/25 000 accouchements. La probabilité de mourir est donc 70 fois plus élevée pour une femme du Sud que pour une autre du Nord. Les causes, multiples et surtout variées, se situent à plusieurs niveaux :
Au niveau institutionnel
Au niveau socioculturel
Au niveau économique
Au niveau de l’évolution liée au modernisme
La liste pourrait s’allonger tant les causes persistent dans la plupart des cas ; mais, si identifier les causes peuvent donner à réfléchir, le plus dur reste la lutte pour l’éradication de ce fléau. Quelles actions à court, moyen ou long terme convient-il d’entreprendre afin que la joie d’accomplir cette œuvre divine de procréation par nos femmes, nos mères, nos sœurs, nos filles ne se transforme en cauchemar pour les familles ?
L’une des premières actions réside dans le changement de mentalités au niveau des femmes elles-mêmes ; il conviendrait que certaines d’entre elles se respectent davantage en cessant de se comporter comme des objets sexuels à la merci d’une catégorie d’hommes, juste pour ressembler à leurs consœurs (acquisitions de biens matériels, situation financière aisée, conditions de vie satisfaisante).
L’engagement de tous et plus particulièrement celui des hommes à reconnaître le droit des femmes à un environnement juridique, culturel, social et économique devra être un combat quotidien et ce, à tous les niveaux. Pères et maris doivent se départir des préjugés qui identifient leur attachement à la femme ou à la fille en état de grossesse à une faiblesse masculine ; les comportements des hommes (affection, tendresse assurance) tout au long de la grossesse constituent des prémisses pour un accouchement à moindres risques. En effet, la grossesse, qu’elle soit désirée ou non, est une question de vie ou de mort et nécessite que l’on s’y attache avec la plus grande attention.
Certes, des efforts considérables sont faits par les autorités à travers le ministère de la Santé, celui de la Promotion de la femme et les diverses associations qui œuvrent inlassablement pour le bien-être de la mère et de l’enfant, mais il convient d'observer que ceux-ci demeurent insuffisants au regard de l’ampleur du phénomène. En effet, la plupart des actions entreprises dans ce sens tendent à minimiser, voire à parvenir à la gratuité (le kit d’accouchement revenant aujourd’hui à 900 francs CFA) ; la pauvreté mise en cause par certaines franges de la population risque de ne plus constituer un handicap majeur à la fréquentation des formations sanitaires. Il s’agirait peut-être plus d’une question de mentalité ou de l’ignorance de ces acquis.
Aussi, un fait non moins important qui freine la réduction de cette surmortalité maternelle est sans nul doute la corruption et les détournements de produits qui s’opèrent dans les structures sanitaires. Ces actes qui s’apparentent à des crimes doivent être sanctionnés avec la plus grande énergie afin que cela serve d’exemple.
La sensibilisation et le plaidoyer doivent se poursuivre et s’intensifier dans l’optique d’une prise de conscience véritablement différente de la ferveur de la fête. Cette sensibilisation sera de plus en plus orientée vers les hommes dans le but d’infléchir certaines tendances trop radicales liées au rôle de chef de famille attribué à l’homme et d’enrayer les blocages créés par certains à l’endroit de leurs épouses. Ce qui sollicitera de la part de chacun une introspection en prélude à un changement de mentalité qui conduira à des actions salutaires en faveur des femmes ; (organisation des journées de dons de sang destinés aux maternités, réduction des moyens financiers alloués à ces commémorations festives au profit de la réalisation d’infrastructures sanitaires ou d’équipements adéquats).
Pour ce faire, nous suggérons la réalisation de spots publicitaires, d’émissions radio-télévisées, de tables rondes, de théâtres-forum, de publications sur la question, aussi bien en français que dans la plupart des langues nationales instrumentées. En un mot, un plan intégré de communication étalé sur au moins deux ans dont une évaluation en termes d’impact de l’information ressortirait le bilan. La bonne information est toujours source de changement positif. Pour ce faire, les responsables des principales radios communautaires, les leaders politiques, religieux et coutumiers, pourraient être davantage sensibilisés sur la question pour constituer à la base des relais, comme c’est actuellement le cas dans la lutte contre l’excision.
En outre, une meilleure organisation des accoucheuses traditionnelles, de plus en plus nombreuses, du reste, pourrait déboucher sur une formation conséquente à l’hygiène et aux premiers soins de ces dernières pour une prise en charge de certaines patientes avant ou au cours de l’évacuation. Quand on sait que 50 à 70% des accouchements continuent d’êtres pratiqués à domicile même dans certains milieux urbains de notre pays.
Aussi, les partenaires techniques et financiers (PTF) en particulier et la communauté internationale dans son ensemble, doivent appuyer les efforts du pays de sorte que perdre la vie en voulant donner ne devienne qu’un lointain souvenir.
Un thème qui doit demeurer d'actualité pendant 3 ans
Il est évident que cela demeure une œuvre de longue haleine et c’est pourquoi ce thème si important devra être d’actualité durant au moins trois ans, avec des objectifs intermédiaires et progressifs dont la réalisation ouvrira de nouveaux sillons pour des victoires futures. Nous pensons qu’il serait plus judicieux que :
Vu sous cet angle, les objectifs sur trois ans seront le gage d’une implication de tous en faveur de la maternité sans risques de nos mères, filles, sœurs et épouses et le bonheur de nos familles. Cette réflexion est aussi une invite à un engagement véritable pour que «donner la vie sans périr» devienne une réalité.
Rémy Yaméogo
Restez informés : recevez, chaque mercredi, la lettre d'informations de Santé tropicale. Inscriptions
Ce contenu gratuit vous est destiné :
Adresse
Téléphone
Contactez-nous
Actualités
Articles médicaux