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Le soleil | Sénégal | 22/02/2006 | Lire l'article original
Les agents du Centre Marc Sankalé s’y emploient avec tact et professionnalisme
quand il s’agit d’annoncer aux malades du diabète qu’on
doit leur amputer un orteil, une jambe ou une cuisse. « Souvent, c’est
difficile de faire l’annonce. Les malades acceptent difficilement l’amputation.
Il y en a qui refusent tout bonnement, disparaissent quelque temps avant de
revenir après des complications », explique Nassibatou Diaby, une
infirmière de taille moyenne arborant une blouse blanche.
Cette jeune femme souligne que, malheureusement, au retour de ces malades jadis
perdus de vue, les choses se trouvent plus compliquées et, à ce
stade-là, ils n’ont plus le choix. « Nous leur invitons vivement
à respecter les avis des médecins qui ne leur veulent que du bien.
Par contre, il y a des diabétiques qui, une fois qu’on leur fait
part de la suite à donner à leurs cas, ils se soumettent sans
problèmes à l’amputation ».
Le temps de guérison dépend de la partie qui est amputée,
selon elle. Cette infirmière corrobore les dires de certains malades
à propos du caractère tentaculaire des besoins financiers auxquels
ils doivent faire face. « Il y a des malades qui habitent loin et qui
n’ont pas beaucoup de moyens. C’est difficile pour eux de venir
se faire soigner. Il y a des gens qui cassent leurs tirelires pour venir ici.
À titre d’exemple, une personne qui venait de Rufisque dépensait
jusqu’à 8000 FCfa pour son transport toutes les fois qu’elle
avait un rendez-vous ».
Situation d’éternel assisté
Cela montre combien c’est difficile pour les démunis, quand on
sait qu’il y a des diabétiques qui viennent au Centre chaque jour
pendant 3 semaines ou bien ceux qui ont rendez-vous 3 fois dans la semaine,
selon elle. À l’en croire, certains sont souvent confrontés
à des ruptures de médicaments, faute d’argent. Or, le non
respect de la prise des médicaments peut causer des complications.
Nassibatou Diaby insiste en disant que le personnel du Centre Marc Sankalé
a la volonté de faire toujours plus, mais les moyens dont il dispose
sont très en deçà des besoins des malades. « Le Centre,
du fait de son statut, fait face à un problème de moyens. Nous
recevons parfois jusqu’à 65 malades par jour, or, il n’y
a pas assez de pinces ». En clair, le matériel dont le Centre dispose
ne correspond nullement au nombre des malades à soigner. « Dans
notre centre, se plaint-elle, c’est la grande débrouille, on se
démène comme de beaux diables avec les moyens du bord ».
Inutile donc de dire que les conditions de travail du personnel de ce Centre
ne sont pas enviables.
C’est pourquoi dans ce contexte où les maladies chroniques «
cancer, diabète, etc.) sont désormais prises en compte par l’Etat
dans le budget du ministère de la Santé, ces travailleurs attendent
avec impatience que l’Etat revoie le statut de cette structure de référence
en Afrique dans la prise en charge du diabète. L’heureuse conséquence
qui en découlera sans doute est que le Centre aura, à partir de
ce moment, une subvention comme les autres structures sanitaires, et va ainsi
se départir de sa situation d’éternel assisté. On
peut aussi dire, sans risque de se tromper, que les agents du centre et leurs
malades diabétiques ne s’en porteront que mieux.
Assistance aux diabétiques : Le précieux accompagnement
de l’Assad
L’Association sénégalaise de soutien et d’assistance
aux diabétiques (Assad) joue aussi un rôle d’une importance
capitale dans l’accompagnement des malades dans cette étape critique
qu’est l’amputation. Il le faut vraiment. Puisque, à en croire
notre confrère Baye Omar Guèye, un des responsables de l’Assad,
parmi les amputés, 75 % perdent la vie pour défaut d’accompagnement,
de prise en charge psychologique. « Nous sommes conscients de cela. C’est
pourquoi nous assistons les malades avant, pendant et après l’amputation
».
La perte d’un organe s’accompagne de douleur énorme, de défaillance,
etc. « Dans l’accompagnement, nous essayons de faire en sorte que
les personnes amputées nous regardent comme leur alter ego. Nous leur
faisons comprendre que l’amputation est normale, que c’est une chose
incontournable, et qu’il n’y avait pas d’autres solutions
», explique Baye Omar Guèye en ajoutant qu’ils font remarquer
aux diabétiques qu’à une certaine étape, l’amputation
est la solution ultime pour faire face à la maladie.
Invite aux familles des diabétiques
« Souvent, beaucoup de gens se réfugient derrière les croyances
religieuses en disant qu’on leur a jeté un sort. Quelquefois, c’est
vrai, mais, parfois, ce n’est pas le cas. L’amputation intervient
souvent quand la personne reste longtemps sans connaître qu’elle
est diabétique. Parfois, c’est lorsque la personne part voir le
médecin en dernier recours, après avoir fait un tour sans succès
chez les tradipraticiens. Dans les activités de sensibilisation, nous
conseillons les gens d’aller voir un podologue dès qu’ils
se rendent compte de l’existence d’une plaie au niveau de leurs
pieds ».
De l’avis de ce responsable de l’Assad, il faut prendre les devants.
« L’association joue un rôle d’accompagnement, de sensibilisation
et d’éducation. Mais, il faudrait que nous soyons au courant. Vu
l’ampleur de la maladie, nous ne pouvons pas être partout. Il y
a beaucoup de gens que nous avons aidés et accompagnés ».
Selon lui, il y a plusieurs personnes amputées qui sont décédées
parce qu’elles n’ont pas accepté l’amputation. Baye
Oumar Guèye en profite pour lancer un appel aux familles des amputés
de ne pas les fuir, de ne pas les isoler. « Il ne faut pas leur rendre
la vie difficile, il faut simplement être avec eux, comme disait l’autre,
car l’amputation est juste une étape qu’il faut négocier
», conclut Baye Omar Guèye.
J. B. Sène
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