← retour Santé tropicale
Accès aux sites pays BENIN BURKINA FASO CAMEROUN CENTRAFRIQUE CONGO COTE D'IVOIRE GABON
GUINEE MADAGASCAR MALI R.D. CONGO SENEGAL TOGO
Le pays | Burkina Faso | 15/05/2006 | Lire l'article original
Cette année encore, l'harmattan, un vent chaud chargé de poussière et de sable, en provenance du Sahara, et la méningite se sont donné rendez-vous au Burkina. "Au 19 mars 2006, on avait un total de 6 110 cas suspects notifiés par les structures de santé, dont 616 décès. Dans 21 districts sanitaires sur les 55 que compte le pays, on a atteint le seuil d'alerte épidémique", résume le Dr René Sylvestre Tiendrébéogo, épidémiologiste à la Direction de la lutte contre la maladie du ministère de la Santé.
Son service surveille les affections dites à potentiel épidémique, au nombre de sept, dont le choléra, la fièvre jaune, la poliomyélite. Mais pour ce spécialiste, la méningite est la plus redoutable de toutes. Elle sévit toute l'année, de façon sournoise et fait le plus grand nombre de victimes entre octobre et avril, pendant la saison sèche. Le rhume, les otites et autres affections des voies respiratoires, fréquentes durant cette période, fragilisent les muqueuses que les méningocoques, germes responsables des épidémies de méningite, empruntent pour passer dans le sang. La colonne vertébrale est ainsi atteinte, le cerveau attaqué, d'où l'appellation populaire de "maladie de la nuque raide", qui peut entraîner le coma, la surdité ou des troubles neurologiques à vie. Avec la saison des pluies et l'accroissement de l'humidité, la maladie baisse en intensité.
Environ une fois tous les dix ans, l'épidémie frappe une douzaine de pays à la fois, situés dans la ceinture africaine de la méningite, qui va du Sénégal à l'Ethiopie. Ainsi, en 1996, on a enregistré 200 000 cas en Afrique, dont 42 000 au Burkina, qualifié par certains de "boucle" de la ceinture. Surveillance, sensibilisation du public, vaccination de masse, traitement aux antibiotiques : les autorités sanitaires ne restent pas les bras croisés. Mais les bactéries responsables de la maladie se jouent de leur détermination.
Réduire l'incidence et stopper la transmission
Un sérum, le vaccin conjugué A, dont la production est prévue pour 2009, devrait faire reculer la maladie. C'est la conviction de l'équipe du Projet vaccin méningite (PVM), financé par la Fondation Bill et Melinda Gates. Rodrigue Barry, chargé de communication du projet, au siège de la représentation de l'OMS (Organisation mondiale de la santé) au Burkina, décrit ce qu'il va changer dans la vie de millions d'Africains. "Le vaccin conjugué A permettra de réduire l'incidence de la souche A, la plus grave de toutes", rappelle-t-il. Le nouveau vaccin, susceptible de protéger même les enfants de moins d'un an, devrait être intégré au Programme élargi de vaccination, permettant ainsi d'immuniser les populations sur 10 à 15 ans et non 2 ou 3 comme c'est actuellement le cas. "Si on vaccine les gens tous les 10 ans, on économise financièrement, on fatigue moins la population et on évite le risque de ce qui s'est passé pour la polio, à savoir la rumeur et la lassitude dues aux multiples campagnes", résume le chargé de communication.
Ce vaccin devrait permettre aussi de briser la chaîne de la transmission. C'est ce que M. Barry appelle l'''effet parapluie de protection", suggérant par là que les personnes protégées ne pourront pas transmettre la maladie à leur interlocuteur, en parlant ou en éternuant, comme c'est le cas aujourd'hui. Autre point fort de ce nouveau sérum : il ne coûtera que 0,32 euro, soit 200 F CFA. Fabriqué en Inde, il sera testé cette année au Mali et en Gambie sous la supervision de l'OMS.
Plusieurs germes de méningocoques
Le Dr Tiendrébéogo comprend et partage l'enthousiasme des promoteurs du vaccin. "Ça pourrait être un élément très important pour le contrôle des épidémies de méningite", dit-il. Il rappelle toutefois la multitude de germes responsables de la méningite et la nécessité de les surveiller. "On peut et on doit, comme l'ambitionne le projet, tenter d'éliminer la méningite à méningocoques A en tant que problème de santé publique, mais si d'autres germes émergent, cela va compliquer la situation", prévient-il.
Sa réserve se justifie. En 2002, une nouvelle souche de bactéries à méningocoques faisait son apparition au Burkina, le W135, aujourd'hui en recul mais qui peut resurgir et provoquer de nouvelles flambées épidémiques. "Si on arrive à éliminer le A, sachant que la nature a horreur du vide, il ne faudrait pas qu'on crée une niche pour le W135 ou d'autres sérogroupes", s'inquiète l'épidémiologiste. Une réserve maintes fois parvenue aux oreilles de l'équipe du projet qui répond invariablement qu'elle veut éliminer le risque d'épidémie, pas la méningite. "Entre sauver 1 500 morts par an au Burkina et davantage tous les 10 ans en Afrique et échafauder des hypothèses, que choisissez-vous?", demande Rodrigue Barry, qui estime qu'en raisonnant ainsi, on n'aurait pas éliminé la variole.
Souleymane Ouattara
Restez informés : recevez, chaque mercredi, la lettre d'informations de Santé tropicale. Inscriptions
Ce contenu gratuit vous est destiné :
Adresse
Téléphone
Contactez-nous
Actualités
Articles médicaux